Hydrocarbures : la folle course du groupe autrichien OMV pour divorcer de la Russie

  • AFP
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Pour le groupe pétrolier et gazier autrichien OMV, les liens noués avec la Russie sont de l'histoire ancienne. Les investissements ont été gelés et "le travail doit continuer" pour réduire la dépendance, selon son PDG.

"Concernant cette saison, on peut être confiants mais pour l'hiver prochain, il faut poursuivre activement les efforts", a déclaré Alfred Stern, lors d'un entretien à l'AFP depuis son bureau moderne avec une vue plongeante sur Vienne.

Dans la foulée de l'offensive de Moscou en Ukraine, OMV s'était retiré du projet de gazoduc Nord Stream 2 et avait stoppé ses investissements en Russie, après des annonces similaires de ses concurrents.

Son exposition a ainsi été réduite à 2% du total de ses actifs dans le monde.

"Du fait du changement de situation, nous avons décidé de ne plus mettre la Russie au coeur de nos opérations" et de ne plus "réaliser d'investissements dans ce pays", explique le dirigeant de 57 ans, aux manettes depuis septembre 2021.

La production totale d'hydrocarbures va tomber à "environ 390.000 barils par jour" en 2022, contre 486.000 en 2021, pour cette entreprise de premier plan en Europe centrale.

Méga-profits

Du côté du gaz, OMV, première entreprise occidentale à signer un contrat de livraison avec l'Union soviétique en 1968, s'est trouvée en première ligne.

Devant la réduction des livraisons du géant russe Gazprom, elle s'est lancée dans une diversification tous azimuts en direction de la Norvège ou encore du Moyen-Orient.

"Nous venons de nous rendre à Abu Dhabi et d'y signer un accord afin d'essayer de garantir les livraisons", a ajouté le responsable de cette société intégrée de la production à la distribution, qui compte 22.000 salariés.

Détenu à 31,5% par l'État autrichien et à près de 25% par le fonds souverain d'Abu Dhabi, le groupe développe également de nouveaux gisements, notamment en Mer noire au large de la Roumanie.

Avant l'invasion, 80% du gaz importé par l'Autriche provenait de Russie, un chiffre tombé à 20% en octobre d'après le gouvernement même si la dépendance reste forte sur le long terme, préviennent les experts.

Malgré les difficultés posées par la guerre, OMV a engrangé depuis des méga-profits de plusieurs milliards d'euros du fait de la flambée des cours et versé un dividende spécial à ses actionnaires, ce qui a provoqué la colère d'ONG.

"Nous devons rester en mesure de générer des rendements pour attirer les capitaux", se justifie Alfred Stern au sujet du débat sur la taxation des profits exceptionnels, dans une période où l'inflation rogne les revenus des ménages.

Tout comme il fustige les "effets secondaires imprévisibles souvent néfastes" de "tout interventionnisme dans l'économie de marché" - en allusion à l'embargo européen et au plafonnement du prix du pétrole russe -, il refuse d'être pointé du doigt comme pollueur face au réchauffement climatique.

"Je nous vois en fait comme une partie de la solution, car il faut de grandes entreprises solides financièrement pour relever un si grand défi", estime-t-il, rappelant ses investissements dans l'innovation.

"Nous fabriquons des matériaux qui allègent les voitures, nous produisons du carburant durable permettant de réduire les émissions de CO2 de 80% pendant un vol", énumère-t-il, promettant d'"éliminer progressivement le pétrole et le gaz d'ici à 2050".

Un sacré pari pour un groupe qui exploite actuellement 1.800 stations services dans dix pays européens, explore, développe et produit du pétrole et du gaz en Europe, au Moyen-Orient, en Afrique, dans la mer du Nord et en région Asie-Pacifique.

Dénonçant le "greenwashing", des militants écologistes ont aspergé mi-novembre de liquide noir une oeuvre de Klimt à Vienne lors d'une journée portes ouvertes sponsorisée par OMV.

Ce fleuron coté en Bourse estime en retour que "la société civile, la politique et l'industrie doivent s'unir pour avancer plus rapidement".

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