La filière solaire brille en Allemagne mais manque de bras...

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En équilibre sur la pente du toit, l'apprenti fixe le panneau solaire, sous l'oeil satisfait de son formateur : Pascal Ode sera bientôt prêt à renforcer l'industrie photovoltaïque allemande qui manque cruellement de bras.

C'est sur Instagram que le jeune homme de 19 ans a vu passer l'annonce proposant d'être formé en quatre semaines à la pose de panneaux solaires.

L'envie d'apprendre "quelque chose de nouveau", l'attrait du "travail au grand air" l'ont convaincu de rejoindre ce chantier-école dans la banlieue de Berlin, raconte-t-il à l'AFP.

Le hangar résonne de bruits de perceuses, de visseuses, manipulées par des grappes d'apprentis casqués et arnachés, s'entraînant sur des répliques de toit posées au sol.

Une effervescence à l'image du boom que connaît la filière solaire dans une Allemagne assoiffée d'énergies renouvelables pour réussir sa transition et remplacer le gaz russe.

La puissance photovoltaïque installée dans le secteur résidentiel a augmenté de 40% l'année dernière par rapport à 2021.

"Depuis l'invasion russe de l'Ukraine, beaucoup de gens veulent s'émanciper des énergies fossiles et des coûts élevés de l'énergie", constate Wolfgang Gründinger, porte-parole d'Enpal, une des nombreuses jeunes entreprises surfant sur cette tendance.

Livreurs reconvertis

La start-up berlinoise propose des panneaux solaires en location longue durée dont ses équipes assurent la pose et l'entretien. Créée en 2017, Enpal dit avoir vendu 40.000 abonnements, dont 18.000 pour la seule année dernière, et tourner actuellement au rythme de 2.000 kits installés par mois.

"Nous devons installer beaucoup d'unités le plus rapidement possible, alors que nous connaissons une très forte pénurie de travailleurs qualifiés", constate Alexander Friedrich, l'un des instructeurs embauchés par l'entreprise.

Enpal a partiellement résolu le problème en créant l'an dernier sa propre école de formation de monteurs et d'électriciens spécialisés, installée à Blankenfelde, au sud de Berlin. C'est celle qu'a intégrée Pascal Ode en début d'année.

"Nous recrutons des gens de tous horizons, d'anciens pizzaïolos, des cuisiniers, des livreurs de repas, des chauffeurs de taxis...", énumère M. Gründinger. L'école forme jusqu'à 120 nouveaux salariés par mois.

Mais les besoins sont immenses : l'Allemagne veut que 80% de la consommation brute d'électricité soit couverte par des énergies renouvelables d'ici 2030, contre 46% l'an dernier. La loi a fixé l'objectif d'installer 215 gigawatts (GW) de puissance photovoltaïque à cette échéance, impliquant que le développement annuel soit multiplié par trois (7,2 GW installés en 2022).

Des installations solaires doivent fleurir sur les toits des usines, des bâtiments commerciaux, dans les champs, selon les projets du gouvernement.

Or "la pénurie de travailleurs qualifiés menace de ralentir la transition énergétique" dans la première économie européenne, avertit l'Institut économique allemand (IW), l'un des plus réputés du pays, dans un récent rapport.

Dépendance chinoise

Au point que la fédération des industries solaires BSW dit compter sur la grande réforme migratoire préparée pour cet été par le gouvernement d'Olaf Scholz pour combler ses besoins de main d'oeuvre.

"Nous développerons l'intégration d'étrangers dans la filière solaire après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'immigration de travailleurs qualifiés", indique à l'AFP son président Carsten Körnig.

La fédération cite en exemple un récent accord qui vise à envoyer en Allemagne des ouvriers indiens formés dans leur pays au photovoltaïque.

Electriciens, experts en chauffage et climatisation, informaticiens, il manque actuellement environ 216.000 travailleurs qualifiés pour développer l'énergie solaire et éolienne, selon l'institut IW.

Sans compter les besoins pour remettre sur pied une filière de production de panneaux solaires, alors que l'écrasante majorité des composants (polysilicium, wafers, cellules) arrivent de Chine, posant un problème de souveraineté pour les Européens.

L'Allemagne comptait pourtant jusqu'aux années 2010 plusieurs leaders mondiaux dans la production de cellules photovoltaïques.

La réduction des aides publiques et la montée en puissance de la concurrence chinoise ont étranglé ces fabricants, conduisant à la suppression de quelque 100.000 emplois dans la filière, selon le syndicat IG Metall.

La baisse des coûts de fabrication des cellules et la hausse de la demande pourraient cependant faire renaître cette industrie, à l'image de la nouvelle usine inaugurée en 2021 par le groupe suisse Meyer Burger, entre Berlin et Leipzig, sur le site d'une ancienne entreprise photovoltaïque ayant fait faillite il y a dix ans.

Commentaires

Serge Rochain

Le renouveau se voit en Allemagne..... ils forment pour l'éternité alors qu'en France on forme pour!.....50 ans a mieux !

Reg

En Allemagne, ils installent des panneaux solaires.
En France, on brûle des poubelles.

Jmtn

Mais qui règle le coût du stockage de l’énergie électrique ?

Jean

L'a transition énergétique menacée par : "la pénurie de travailleurs qualifiés menace de ralentir la transition énergétique" (l'Institut économique allemand (IW),
"au point que la fédération des industries solaires BSW dit compter sur la grande réforme migratoire préparée pour cet été par le gouvernement d'Olaf Scholz pour combler ses besoins de main d'oeuvre".
"Nous développerons l'intégration d'étrangers dans la filière solaire après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'immigration de travailleurs qualifiés", indique à l'AFP son président Carsten Körnig.
Oh la, la ! et en plus les chinois s'en mêlent et vendent les panneaux que les allemands ne fabriquent plus ? Mais comment cette grande nation en est réduite à faire éclairer ses maisons avec des PV solaires chinois posés par des Indiens ?
Peut-être que le capitalisme poussé dans ses extrêmes ne connait que le fric, avec des Indiens payés au lance pierres qui posent des panneaux chinois à bas coûts, ce qui ne exclut les travailleurs allemands et les usines allemandes. Mais quand le fric est le seul moteur des sociétés, il n'y a plus de sociétés, mais du fric.

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