- Connaissance des Énergies avec AFP
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Douze ans après un rapport très sombre sur les institutions sociales de l'énergie, gérées par EDF, Engie et leurs filiales, la Cour des comptes épingle de nouveau la gestion de ce qui est parfois qualifié de plus gros comité d'entreprise de France.
Si elle salue "des actions de modernisation et de réorganisation" menées par les gestionnaires des organismes depuis les "nombreux dysfonctionnements et irrégularités" relevés lors de précédents contrôles, elle attire l'attention, dans ce rapport publié le 6 octobre mais dont l'AFP a pris connaissance jeudi, sur une gestion des activités sociales qui "demeure très insatisfaisante" et une situation financière "particulièrement fragile" des institutions qui en ont la charge.
Ces œuvres sociales, ouvertes à environ 665 000 personnes, salariées et pensionnées ainsi qu'à leurs familles, couvrent "un large spectre d'activité", rappellent les magistrats de la rue Cambon : vacances, restauration méridienne des salariés, aides sociales, arbre de Noël des enfants, billetterie, etc.
Parmi les principaux griefs de la Cour, le montant de près de 400 millions d'euros par an consacré au financement des organismes gestionnaires des activités sociales, dont "plus de la moitié" financent les frais de structure des organismes, "au profit d'un nombre limité de bénéficiaires".
Ces organismes "emploient près de 2 750 salariés permanents, dont 1 800 personnels administratifs, et une moyenne d'un millier de salariés non-permanents", souligne la Cour. Elle déplore des choix historiques de gestion "consistant à privilégier une offre d'activités fondée sur une main d'œuvre et un patrimoine propre aux organismes sociaux plutôt qu'un recours à des prestations de tiers".
En pratique, chaque année, une "faible proportion des bénéficiaires profite réellement des activités les plus emblématiques au niveau national" : 16,5% des familles pour les séjours de vacances "adultes" en 2022, 18% des enfants pour les séjours "jeunes" en 2022, 23% des salariés pour la restauration de midi en 2021, relève la Cour.
"Seule la couverture santé surcomplémentaire proposée aux retraités rencontre un taux d'adhésion élevé (61%) parmi les bénéficiaires potentiels", ajoute-t-elle.
Autre objet de critiques, le patrimoine immobilier des industries électriques et gazières "dont la situation juridique vis-à-vis d'EDF SA et d'Enedis et les conditions de gestion (notamment de cession) posent problème".
Parmi les améliorations, la Caisse centrale des activités sociales (CCAS), chargée des activités nationales, "a fait le choix ces dernières années de réduire l'exploitation directe, et même la détention directe de centres de vacances, au vu des surcoûts engendrés", sans toutefois "que cette stratégie soit opérationnellement bien définie", relève le rapport.
Il souligne toutefois qu'elle a aussi "longtemps maintenu un GIE (Groupement d'intérêt économique, NDLR) et développé une politique de participations financières dans des sociétés, qui (...) s'est avéré être un gouffre financier pour les activités sociales des IEG (Industries électriques et gazières, NDLR) , au détriment des bénéficiaires".
Interrogée par un journaliste de l'AFP, la CGT-Energie, dont les représentants occupent la majorité des sièges de la CCAS, a assuré que la gestion des activités sociales des industries électriques et gazières était "saine et bénéficie à plus de 600 000 personnes sans toucher les factures des citoyens".