Sucre: récolte en berne pour les betteraviers, qui espèrent avoir mangé leur pain noir

  • AFP
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Les betteraviers français, qui ont connu une année de crise terrible, avec des cours en berne, marquée par la fermeture de plusieurs usines et une piètre récolte, espèrent renouer l'an prochain avec une prospérité qui les fuit depuis la fin des quotas.

La CGB, syndicat professionnel des betteraviers français, évalue à 38,6 millions de tonnes la récolte de racines, en raison notamment d'une baisse des surfaces de l'ordre de 7%, résultat de la chute des prix payés aux producteurs, conséquence elle-même d'une déprime des cours mondiaux qui a coïncidé avec la fin des quotas européens.

Le rendement moyen, qui se situe à 85,5 tonnes de betteraves par hectare, soit l'équivalent de 12,6 tonnes de sucre à l'hectare, a souffert de la sécheresse estivale et de fortes pluies automnales. Il a malgré tout légèrement progressé par rapport à l'an dernier, année noire avec 83 tonnes/hectare.

"Nous n'avons jamais connu de prix aussi bas", avait déclaré fin 2018 l'ancien président de la CGB, Eric Lainé.

Les producteurs de betteraves ont même perdu de l'argent l'an dernier, pour la première fois depuis plus de dix ans .

"Faibles rendements, prix bas et coûts de production élevés mettent les betteraviers cette année dans le rouge pour la seconde année de suite avec des pertes moyennes qui pourraient s'élever à 300/400 euros par hectare, avec de grandes disparités selon les régions", a indiqué la CGB mercredi.

"La perspective des prix (du sucre) encourage à une hausse, mais dans tous les cas, vu que tous les groupes étaient dans le rouge, ce n'est pas la future campagne, cette année, qui fera les bons prix, ça c'est sûr, c'est vraiment la campagne d'après", a déclaré Franck Sander, président de la CGB, lors d'un entretien à l'AFP.

1 500 betteraviers privés de débouché

Plus tragique, encore, pour la filière, les fermetures de sites décidées par le groupe Saint-Louis Sucre, filiale française du sucrier allemand Südzucker, à Cagny dans le Calvados et Eppeville dans la Somme, ainsi que des sites du groupe Cristal Union, deuxième sucrier français, à Bourdon (Puy-de-Dôme) et Toury (Eure-et-Loir).

Ces restructurations ont laissé sur le carreau quelque 1.500 betteraviers, désormais privés de débouchés pour cette production.

Des motifs d'optimisme existent tout de même, pour M. Sander. Il a récemment salué la possibilité nouvelle de créer des organisations de producteurs (OP), afin d'établir un rapport de force plus favorables aux planteurs face aux groupes privés, comme Saint-Louis Sucre, par exemple.

Autre sujet de satisfaction, pour les betteraviers, le succès grandissant d'un débouché autre que le sucre: l'éthanol, dont le prix "n'a jamais été aussi élevé sur les marchés. Jamais on n'a utilisé autant d'éthanol en France, à travers les taux d'incorporation, à travers aussi l'E-85 qui permet de rouler 40% moins cher", selon M. Sander.

Il compte également sur le plan de filière déposé au ministère avec les sucriers (SNFS, Cristal Union, Lesaffre Frères, Ouvré Fils, Saint Louis Sucre, Tereos), pour redonner de la compétitivité au secteur et mieux valoriser la production des planteurs.

Dans cette optique, Cristal Union a réalisé sa première campagne de betteraves bio, quand Tereos faisait visiter récemment son usine "hyper-connectée" de Connantre (Marne), pour réduire les coûts.

Mais c'est surtout la remontée des cours européens du sucre à 420 euros la tonne (moins de 300 euros au plus fort de la crise), dans un marché déficitaire, qui laisse espérer aux betteraviers une amélioration de leur sort.

Afin d'en tirer profit, ils souhaitent la mise en place de meilleurs outils de contractualisation au sein des coopératives, mais aussi une meilleure contractualisation entre les groupes sucriers et leurs clients, favorisée par l'utilisation des marchés à terme, afin d'éviter des renégociations intempestives en cas de chute de prix du sucre.

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