Solaire thermique : la plus grande centrale agricole mise en service en Corrèze

Centrale thermique des serres des tomates d'Auïtou

Centrale solaire thermique des écoserres des Tomates d’Auïtou (©Newheat et Les Tomates d’Auïtou)

La plus grande installation solaire thermique dédiée à l’agriculture en France a été mise en service ce 17 novembre par l'entreprise Newheat en Corrèze.

Renforcer la démarche « vertueuse » de tomates sous serres

Produire des tomates « de qualité » toute l'année en France avec une « exploitation vertueuse » semble une vraie gageure. C'est pourtant le pari des Tomates d'Auïtou. Sur ce site de Rosiers-d’Égletons (Corrèze), près de 100 000 plants de tomates sont cultivés « sous 8 hectares d’écoserres chauffées, en culture hors-sol, sans recours aux pesticides, dans une démarche résolument vertueuse, pour une agriculture responsable et locale ».

L'exploitation indique déjà être 100% autonome en eau et 71% autonome en électricité (grâce à deux centrales photovoltaïques). Elle sera à l'avenir autonome à 98% en chaleur également. Jusqu'ici, les serres étaient chauffées grâce à la chaleur « fatale » d'une unité de valorisation énergétique (UVE) locale, mais aussi avec du propane lorsque la source principale était indisponible.

La nouvelle centrale solaire thermique est constituée de 7 091 m2 de capteurs solaires thermiques, soit approximativement la surface d'un terrain de football. S'y ajoute une cuve de stockage thermique de près de 1 500 m3 (correspondant à un volume d'énergie « pouvant dépasser les 200 MWh utiles »). Elle vise à se substituer au propane à l'avenir (du propane pourrait encore être consommé très ponctuellement, par exemple dans l'hypothèse d'un arrêt de l'UVE pendant plusieurs jours en plein hiver).

Un « temps de retour carbone » très court

La centrale pourrait au total fournir 14% des besoins de chaleur annuels des serres, avec une production espérée de 5 400 MWh de chaleur par an. Avec cette substitution du propane par de la chaleur solaire, l'exploitant estime que près de 28 000 tonnes de CO2 pourront être évitées au cours des 20 années à venir. 

« Sur la base d’une production annuelle de 5,4 GWh solaire effaçant du propane », Newheat estime que le temps de retour carbone lié à cette substitution pourrait être « inférieur à 2 ans ». La centrale solaire thermique aura quant à elle une durée de vie supérieure à 30 ans (échéance au bout de laquelle elle pourrait continuer à fonctionner avec une baisse de rendement, à moins de remplacer des équipements).

Outre l'élimination du propane, la nouvelle centrale solaire thermique doit permettre « d’accroître les rendements agricoles, qui étaient historiquement de 40 kg/m² contre 45 à 50 kg attendus avec le solaire thermique ». En effet, l'exploitation corrézienne « répond à un cahier des charges très strict, et ne chauffe ses serres qu'à 19 °C contre environ 20 à 25 °C dans l'agriculture conventionnelle », souligne l'exploitant. Mais lorsque la centrale solaire thermique dépassera la production attendue (volume de stockage thermique utilisé), « la surproduction pourra permettre de monter la température de consigne dans les serres, et donc d'accélérer la croissance / floraison des tomates, donc le rendement ».

Le coût total de ce projet est évalué à plus de 3,7 millions d'euros, environ la moitié de cet investissement provenant d'une aide du Fonds Chaleur de l'Ademe (environ 1,9 million d'euros).

Rappel des objectifs français

Si cette nouvelle centrale se démarque par sa taille, elle reste moitié moins étendue que la plus grande centrale solaire thermique française tous usages confondus, également exploitée par Newheat (centrale à Verdun, alimentant le site industriel Lactoserum de Lactalis, constituée d'environ 15 000 m2 de capteurs solaires).

L'Ademe rappelle que le développement de grandes installations solaires de ce type « sera déterminant dans l’atteinte » des objectifs de la filière, à savoir une production de 6 TWh en France métropolitaine à l'horizon 2030 et de 10 TWh à l'horizon 2035, selon les objectifs du projet de PPE3.

« Cela suppose une accélération très forte du rythme d’installation, de l’ordre de 30% par an », souligne Newheat(1), qui souligne que les grandes installations – réseaux de chaleur et industrie, notamment sur les besoins basse température – seront « indispensables pour atteindre ces volumes ».

En 2024, l'ensemble de la production solaire thermique française s'est élevée à 2,9 TWh, dont 49% dans les DROM (notamment à La Réunion)(2). Dans ces territoires ultramarins, le solaire thermique compte pour près des deux tiers des énergies renouvelables consommées pour la production de chaleur, contre un peu moins de 1 % en métropole. 

dernière modification le

Sources / Notes

1.Newheat rappelle que la filière s’organise « autour d’un Plan stratégique Chaleur solaire visant à lever les freins actuels : simplification des procédures, mécanismes de soutien adaptés, renforcement des capacités industrielles ».

2.Solaire thermique, statistiques du gouvernement.

Sur le même sujet