Arrêt de la centrale de Fessenheim : soulagés, les antinucléaires allemands et suisses restent vigilants

  • AFP
  • parue le

"Elle n'aurait jamais dû être mise en service" : en Allemagne comme en Suisse, les antinucléaires qui ont ferraillé contre la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin), installée aux confins des deux pays, saluent sa mise à l'arrêt mais promettent de "surveiller attentivement" son démantèlement.

Manifestations, grèves de la faim, recours en justice : en quarante ans d'existence, la doyenne des centrales françaises, exploitée depuis 1978, n'a cessé de susciter résistance et controverses dans ces deux pays qui, dans la foulée de l'accident de la centrale japonaise de Fukushima en 2011, ont décidé de sortir du nucléaire.

Une fronde germano-suisse qui, mêlée à celle des antinucléaires français, a certainement pesé dans la décision de fermer la centrale alsacienne. Elle a surtout été nourrie par les nombreux incidents qui ont affecté son fonctionnement et par les inquiétudes liées au niveau de sécurité de ses installations, "largement inférieur aux exigences" actuelles, explique Christian Küppers, physicien nucléaire à l'Öko-Institut de Darmstadt.

Construite sur la rive française du Rhin, à quelques dizaines de kilomètres de Fribourg (Allemagne) et de Bâle (Suisse), Fessenheim est en pleine zone sismique, sans pour autant avoir été conçue pour faire face à de forts tremblements de terre ou à une inondation, pas plus qu'elle ne pourrait, dans l'hypothèse d'une attaques terroriste, résister au "crash d'un avion" de ligne, prévient le scientifique.

« Risque énorme »

Quant aux deux tranches qui abritent ses réacteurs à eau pressurisée, poursuit M. Küppers, elles "sont parmi les plus anciennes au monde encore en service". Autre danger potentiel : Fessenheim "se trouve sur une nappe phréatique d'environ 45 milliards de mètres cube" et une contamination radioactive menacerait "l'alimentation en eau de plusieurs millions de personnes", en Alsace comme en Allemagne, s'inquiète Stefan Auchter, porte-parole de l'association écologiste Bund dans le Bade-Würtemberg, l'État régional allemand contigu.

De quoi donner des sueurs froides aux voisins allemands et suisses qui, tout en ayant tiré pendant des années une partie de leur électricité de Fessenheim, sont malgré tout soulagés de l'arrêt définitif de ses réacteurs : le n°1 cessera de fonctionner le 22 février, le n°2 le 30 juin. Cette "mise à l'arrêt est depuis des années un sujet très important pour nous", confirme Ralf Heineken, porte-parole du ministère de l'Environnement, du Climat et de l'Énergie du Bade-Würtemberg, où la dernière centrale, celle de Neckarwestheim, fermera définitivement en 2022.

Fessenheim "est à proximité immédiate de la frontière" et "l'état de sa sécurité représente selon nous un risque énorme pour toute la région", insiste-t-il.

Les accidents nucléaires de Tchernobyl (1986) et Fukushima (2011) l'ont démontré, "toutes les centrales nucléaires sont potentiellement très dangereuses", renchérit Marco Greiner, porte-parole du gouvernement de Bâle-Ville, l'un des cantons suisses qui avaient réclamé la fermeture de Fessenheim après Fukushima. "C'est pourquoi le gouvernement de Bâle-Ville salue la mise à l'arrêt d'une centrale aussi proche", poursuit M. Greiner.

« Mesures d'évacuation »

Car, aux yeux des Allemands comme des Suisses, l'arrêt de la centrale alsacienne ne signifie pas que tout danger est écarté : la phase de démantèlement, qui durera des années, recèle elle aussi à leurs yeux son lot de difficultés, entre évacuation des substances dangereuses et des déchets, retrait des matériels, assainissement des locaux et des sols, et déconstruction des bâtiments.

Certes, "avec la mise à l'arrêt, les risques seront beaucoup moins grands que lors de son fonctionnement", concède Rudolf Rechsteiner, porte-parole de l'Association trinationale de protection nucléaire (ATPN-TRAS), basée à Bâle. "Mais les bassins d'eau (dans lesquels vont être placés les) éléments combustibles" toujours radioactifs, en vue de leur évacuation, "ne sont protégés ni contre les attentats, ni contre les avions, ni contre les tremblements de terre" majeurs, s'alarme cet ancien député.

Lors du démantèlement, de telles catastrophes pourraient en effet provoquer in fine une "libération" d'éléments radioactifs, met en garde Christian Küppers. Un scénario qui, "dans des cas extrêmes", pourrait nécessiter "des mesures d'évacuation" des populations. Fessenheim "n'aurait jamais dû être mise en service. De ce point de vue, sa mise à l'arrêt intervient 43 ans trop tard", soupire Stefan Auchter, conscient que la phase de démantèlement qui s'ouvre désormais pose "des questions et des tâches complètement nouvelles". Mais une chose est sûre : "nous allons (le) surveiller attentivement".

Commentaires

Justin

Et l'accident de three miles island on en parle? Non car c'est l'exemple de non évenement en cas d'accident et les centrales françaises sotn de se type...

charodane

L'attitude des antinucléaires est édifiante d'obsurantisme et d'incapacité de pondérer les problèmes.
Une chose est certaine, avec de tels arguments ils ne sauveront pas la planète du désastre écologique certain qui se prépare avec le réchauffement climatique et les pollutions "ordinaires".
La voiture tue environ 10 personnes par jour en France, la pollution de l'atmosphère provoque plusieurs dizaines de milliers de morts prématurées par an en France.
Il faudra du temps, beaucoup de temps, pour qu'on reconnaisse publiquement qu'il n'y a, en l'état des connaissances actuelles et pour longtemps encore, aucune autre source d'énergie bas carbone et pilotable que l'énergie nucléaire.
Il sera déjà bien trop tard pour redresser la situation climatique qui va déboucher sur des problèmes non seulement environnementaux mais aussi sociaux.
Les esprits scientifiques ont de quoi être affligés. Pourquoi ne les entend t'on presque jamais poussez des coups de gueule, puisque c'est la seule façon aujourd'hui d'être entendu (mais pas forcément compris malheureusement).
Le 22 février prochain sera un jour de deuil, le deuil de la rationalité et de l’expertise.

Pascal

L'énergie nucléaire ne représente que 2 à 3 % de l'énergie totale consommée sur la planète. Elle ne pourra jamais atteindre un niveau de production suffisant pour résoudre le problème du réchauffement climatique.
Pourquoi ne peut on pour une fois, avoir un autre choix que la peste ou le choléra.
On ne veut ni nucléaire, ni effet de serre !!!!

Dominique Wenger

Moi je suis effaré qu on ai fermé Fessenheim et pas la centrale aux charbon de Rheinhafen Dampfkraftwerk à 130 km de Fessenheim, près de Karlsruhe et qui fait sensiblement la même puissance. Pour la protection de l environnement et le climat , cela aurait été une solution beaucoup plus intelligente et efficace.

Rblase

Les centrales au charbon de l'Allemagne ce sont des dizaines de morts tous les ans , les allemands devraient peut être aussi actif pour fermer leurs centrales

Gerald B

Ils sont contents les verts O_o
Annuellement, 40 Milliards de tonnes de CO2 envoyés dans l'atmosphère. La poubelle des énergies fossiles !!!
https://www.planetoscope.com/rechauffement/899-cout-du-rechauffement-cl…
Le réchauffement climatique est responsable de 300.000 morts par an et coute 90 milliards d'euros (125 milliards de dollars) chaque année soit plus de 2850 euros chaque seconde (compteur), selon un rapport publié par le Forum humanitaire mondial de mai 2009. Selon ce rapport, vers 2030, les décès au réchauffement atteindront près d'un million par an !

Mandron

Les contre vérités des anti nucléaires suisses et allemands sont flagrantes . On aurait du rejeter ces allégations mensongères qui ne sont proférées que pour faire peur et si l’état français était à la hauteur on aurait défendu l’intérêt national ainsi que notre indépendance énergétique.

DOMISSE

Je suis particulièrement surpris du parti pris des antinucléaires suisses sur FESSENHEIM.Les 4 centrales nucléaires suisses (pour 5 réacteurs) ont été mises en service entre 1969 et 1984. C’est en mai 2011 que le conseil fédéral suisse a confirmé la sortie progressive de l’énergie nucléaire en décidant de ne pas renouveler les centrales nucléaires en service et en optant pour leur arrêt définitif une fois que celles-ci auront atteint 50 ans.
Ces centrales sont respectivement BEZNAU (2 tranches REP mises en service en 1969 puis 1971), GÖSGEN (1 tranche REP mise en service en 1979) d’une technologie voisine de celle de FESSENHEIM, et LEIBSTADT (REB mise en service en 1984) et MÜLHEBERG (REB mise en service en 1972) d’une technologie voisine de celle de FUKUSHIMA…..
Comprenne qui pourra...

studer

Incroyable ! le dogme antinucléaire, comme tous les dogmes, rend sourd et aveugle ! La plupart de nos amis allemands sont soulagés de voir disparaître la centrale nucléaire française, qui n'a jamais blessé personne et qui est l'une des plus sûres au monde, alors qu'ils sont entourés de toutes parts de leurs centrales au lignite qui font des milliers de morts par cancer des poumons CHAQUE ANNEE, y compris en France (les particules fines traversent le Rhin..) et dérèglent le climat par leurs rejets de CO2 !
Et nos amis Suisses sont soulagés de voir s'arrêter la "vieille" centrale de Fessenheim, sans s'apercevoir (ou en oubliant de mentionner !) que leur centrale de Beznau a dix ans de plus que sa voisine française !!
Le dogme rend sourd et aveugle...

Ajouter un commentaire

Suggestion de lecture