Barrage ukrainien : quel danger pour la centrale nucléaire de Zaporijjia ?

  • AFP
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La centrale de Zaporijjia, occupée par l'armée russe, est une nouvelle fois fragilisée après la destruction partielle mardi d'un barrage du sud de l'Ukraine, dont l'eau est utilisée pour refroidir le combustible et éviter un accident nucléaire.

L'attaque, dont s'accusent mutuellement Moscou et Kiev, a entraîné l'inondation de nombreuses localités et l'évacuation de milliers de personnes, suscitant un tollé international.

« Pas de danger nucléaire immédiat »

"Il n'y a pas de danger nucléaire immédiat", a affirmé sur Twitter l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), dont les experts, présents sur le site, "surveillent de près la situation".

Même diagnostic du côté de l'Institut français de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui écarte par ailleurs "tout risque d'inondation puisque le barrage est en aval, et non en amont", à 150 km, a précisé à l'AFP la directrice générale adjointe Karine Herviou.

La direction, installée par l'occupation russe dans la zone, a pour sa part assuré que la situation était sous contrôle.

"A l'heure actuelle, il n'y a pas de menace pour la sécurité. Cinq blocs sont arrêtés à froid, l'un est à l'arrêt à chaud", a indiqué sur Telegram le directeur, Iouri Tchernitchouk.

Cette centrale, la plus grande d'Europe, produisait auparavant 20% de l'électricité ukrainienne. Elle a continué à fonctionner les premiers mois de l'offensive russe avant d'être stoppée en septembre.

"La bonne nouvelle est que les six réacteurs sont à l'arrêt depuis plusieurs mois. La puissance est donc plus faible", et les calories à évacuer moindres par rapport à un site en fonctionnement, ajoute Mme Herviou.

Mais un réservoir qui se vide rapidement

L'Ukraine s'est cependant montrée alarmiste. "Le monde se retrouve une fois de plus au bord d'une catastrophe nucléaire car la centrale a perdu sa source de refroidissement" et "ce danger augmente désormais rapidement", a déploré le conseiller à la présidence ukrainienne Mykhaïlo Podoliak.

Les dégâts occasionnés au barrage provoquent actuellement une diminution du niveau du réservoir "de l'ordre de neuf centimètres par heure", a déclaré le directeur général de l'AIEA Rafael Grossi dans un communiqué, contre cinq centimètres dans la matinée.

L'eau se situait dans la soirée à environ 15,4 mètres. Si elle tombe au-dessous de 12,7 mètres, elle ne pourra plus être pompée pour alimenter les circuits de refroidissement de la centrale, ce qui pourrait survenir "dans les prochains jours", a-t-il averti.

Quelles autres options ?

Un "grand bassin" de rétention situé à proximité pourra cependant prendre le relais, selon l'instance onusienne. "Il est actuellement rempli et permettra d'approvisionner la centrale en eau pendant plusieurs mois", a indiqué M. Grossi. "Il est vital que ce bassin reste intact. Rien ne doit être fait pour porter atteinte à son intégrité", avait-il insisté plus tôt, annonçant qu'il se rendrait sur les lieux la semaine prochaine après deux visites depuis le début de la guerre.

L'AIEA évoque aussi d'autres options, comme "l'accès à une excavation profonde dans la zone, au système de distribution en eau de la ville voisine d'Energodar ou encore l'utilisation de véhicules de pompiers pour apporter l'eau". Il faut constamment refroidir le combustible des cœurs des réacteurs ainsi que celui placé dans les piscines d'entreposage.

"Une défaillance prolongée du refroidissement conduirait à un accident de fusion et à des rejets radioactifs dans l'environnement", souligne l'IRSN - un scénario similaire à ce qui s'était passé à Fukushima au Japon lors du séisme qui avait provoqué un tsunami en mars 2011.

Si le personnel du site ukrainien a été formé depuis à de tels événements, l'attaque du barrage dégrade "un peu plus une situation déjà difficile et imprévisible", a déploré le chef de l'AIEA.

La centrale de Zaporijjia se trouve au cœur du conflit : elle a été visée à plusieurs reprises par des tirs et a été coupée du réseau électrique à sept reprises depuis sa prise par l'armée russe, le 4 mars 2022.

Commentaires

Jean FLUCHERE

Poutine veut absolument utiliser l'arme nucléaire tactique. Les chinois lui ont clairement dit qu'ils s'y opposaient. Il a trouvé le moyen de réaliser un accident de fusion de cœur sur cette centrale. Il aura réussi à noyer le sud de l'Ukraine et de provoquer un rejet de radionucléides dans l'environnement. En effet ces centrales ne sont pas équipés de recombineurs d'hydrogène et de filtres à sable sur la décompression des enceintes de confinement comme celles de Fukushima.

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