- Connaissance des Énergies avec AFP
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Le Venezuela et le Guyana, ont ouvert mercredi des "canaux de communication" alors que la tension sur l'Essequibo, la région riche en pétrole en dispute entre les deux pays, ne cesse de monter.
L'armée brésilienne a annoncé mercredi un renforcement de sa présence à ses frontières avec le Guyana et le Venezuela, alors que la Chine a demandé aux deux pays de résoudre leur différend "de manière correcte".
Caracas revendique depuis des décennies l'Essequibo (parfois appelé Guayana Esequiba), territoire de 160.000 km2 représentant plus des deux tiers du Guyana et où vivent 125.000 personnes, soit un cinquième de sa population.
Ses revendications sont devenues plus pressantes depuis la découverte d'importantes réserves de pétrole par ExxonMobil en 2015.
"À la demande de la partie guyanienne, le ministre des Affaires étrangères (guyanien) Hugh Todd a eu une conversation téléphonique avec le ministre des Affaires étrangères Yvan Gil pour discuter de la question du différend territorial", selon un communiqué du ministère vénézuélien.
Les deux pays "ont convenu de garder les canaux de communication ouverts (...) La partie vénézuélienne a exprimé la nécessité de cesser les actions qui "aggravent le différend", ajoute le texte.
Ce rapprochement contraste singulièrement avec le communiqué diffusé à peine cinq heures plus tôt par le même ministère des Affaires étrangères vénézuélien.
Caracas y accusait le président guyanien Irfaan Ali d'avoir donné "d'une manière irresponsable" le "feu vert" à l'installation de bases militaires américaines dans l'Essequibo.
La tension était déjà montée d'un cran mardi avec des annonces des présidents des deux pays.
Le président vénézuélien Nicolas Maduro a préconisé la création d'une zone militaire spéciale près de la frontière et ordonné au géant public PDVSA d'accorder des licences d'exploitation de pétrole et gaz dans la région de l'Essequibo, sous administration guyanienne.
Il a proposé que le pays se dote d'une loi spéciale interdisant la signature de contrats au Venezuela avec des entreprises travaillant dans l'Essequibo avec des concessions accordées par le Guyana.
Le président Ali avait vivement réagi, mardi dans la soirée, lors d'une allocution exceptionnelle à la nation.
"Il s'agit d'une menace directe pour l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance politique du Guyana (...) Une menace imminente" a-t-il déclaré, soulignant que son armée était en "alerte totale" et accusant le Venezuela d'être une "nation hors-la-loi".
- "Guerre" et "rhétorique" -
Il avait annoncé avoir parlé "au secrétaire général des Nations unies et à plusieurs dirigeants (...) de cette évolution dangereuse et des actions désespérées du président Maduro qui (...) constituent un risque important pour la paix et la sécurité".
Pour Mariano de Alba, conseiller de l'International Crisis Group (ICG), M. Maduro cherche à "accroître les risques et d'une certaine manière à générer de l'incertitude" afin de mettre la "pression sur le gouvernement guyanien pour qu'il s'assoie et négocie".
Le Guyana a indiqué à plusieurs reprises que la Cour international de justice (CIJ) dont le Venezuela ne reconnaît pas la compétence dans cette affaire, était l'unique voie de sortie de crise. Le Venezuela veut lui reprendre des négociations selon un accord de 1966 signé à Genève.
"A court terme, la rhétorique de confrontation va se poursuivre, mais en même temps, je considère qu'un conflit armé est peu probable", poursuit l'expert, soulignant que "toute erreur" dans ce contexte pourrait provoquer une escalade rapide.
M. Maduro s'appuie sur le référendum organisé au Venezuela dimanche. Selon les chiffres officiels - contestés par de nombreux observateurs - quelque 10,4 millions d'électeurs vénézuéliens ont participé à la votation et 95% se sont dits favorables à l'annexion de l'Essequibo.
Le Venezuela soutient que le fleuve Essequibo doit être la frontière naturelle, comme en 1777 à l'époque de l'empire espagnol. Le Guyana estime, de son côté, que la frontière date de l'époque coloniale anglaise et a été entérinée en 1899.
Une nouvelle et importante découverte d'or noir a eu lieu en octobre dans l'Essequibo, ajoutant aux réserves du Guyana au moins dix milliards de barils, le situant à un niveau similaire à celui du Koweit.
Le Guyana dispose ainsi des plus importantes réserves de pétrole par habitant au monde, et le Venezuela les plus importantes réserves prouvées de la planète.