En France, les acteurs de l'éolien offshore attendent « l'accélération » promise

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Comment construire 50 parcs éoliens offshore d'ici 2050 ? Les acteurs du secteur attendent, non sans inquiétude, les moyens et surtout la planification qui pourraient permettre à la France de combler son retard et de se déployer dans cette énergie.

Au salon professionnel Seanergy du Havre, tous les grands développeurs du continent sont là : le marché français attire, 2e gisement européen par sa façade maritime et ses régimes de vents.

Les chiffres auraient pourtant pu faire réfléchir les potentiels investisseurs: il faut aujourd'hui 10 ans en France pour mettre un site en service, cinq en Allemagne, six au Royaume-Uni... Sept parcs (3,6 gigawatts au total) ont à ce jour été attribués à des opérateurs, mais l'Hexagone vient juste de produire ses premiers électrons, avec son parc de Saint-Nazaire en cours d'achèvement.

Or selon toutes les projections, pour atteindre en 2050 la neutralité carbone nécessaire et éviter les pires effets du réchauffement, la France devra massivement déployer l'éolien offshore, qu'elle relance le nucléaire ou pas. Pour RTE, le gestionnaire du réseau haute tension, il en faudra 22 à 62 GW, selon le bouquet choisi.

Mais le pays pourra-t-il y arriver ?

"Le rythme des projets devra être plus soutenu et ce dès cette décennie", souligne Vincent Balès, DG France de l'énergéticien allemand wpd, appelant comme le reste du secteur à une planification, plutôt qu'au lancement de projets "au coup par coup".

L'horizon de 40 GW (environ 50 parcs) évoqué pour 2050 par Emmanuel Macron "a donné une perspective à la filière, mais quelle sera la mise en oeuvre?", dit-il. "En Europe, les planifications qui ont marché identifient des zones propices. En France, nous sommes échaudés par les planifications par façade, qui définissent surtout des zones d'exclusion. Il y a une inquiétude de la filière sur la méthode".

Dans les travées du salon, on cite l'Allemagne et sa cartographie "assez fine", aux zonages pour le court et le long terme.

« Trou d'air »

"La planification au niveau national, ce n'est pas le choix qu'on a fait en France, car il faut un dialogue avec les acteurs et les territoires", a répondu au Havre Eric Banel, directeur général des Affaires maritimes au secrétariat d'Etat chargé de la Mer, annonçant devant le Syndicat des énergies renouvelables (SER) la "relance d'un cycle de planification" par façade.

Pour le SER, cela risque d'être beaucoup trop tard. L'association demande à l'Etat de prépositionner de grandes zones potentielles, avant de lancer les débats sur zones pour affiner. Au risque sinon d'un "trou d'air" après 2023, date des derniers appels d'offres prévus à ce jour, délétère pour le secteur, ses usines et ses sous-traitants.

Elodie Martinie-Cousty, qui a participé pour France Nature Environnement (FNE) à tous les débats publics de l'éolien offshore, ne cache pas non plus sa frustration: l'Etat devra changer de méthode, sauf à générer de nouveaux recours et contestations, dit-elle.

Cette vice-présidente du Conseil économique social et environnemental (Cese) lui reproche de ne pas considérer l'état global - "désastreux" - de la mer, notamment de ne pas mettre à plat aussi les impacts des activités traditionnelles, pêche et transports.

"L'éolien est nécessaire, il faut donner aux opérateurs une visibilité pour qu'ils puissent investir. Mais on ne peut planifier l'entrée d'une nouvelle activité industrielle massive sans avoir mesuré les impacts des activités +historiques+. On demande à l'Etat de faire son travail d'Etat stratège. En un an on peut faire cette planification si tout le monde se met autour de la table".

Le SER, comme FNE, demandent aussi plus de moyens humains pour mettre les services de l'Etat "à la hauteur de l'enjeu": les agents chargés d'instruire les dossiers sont cinq fois moins nombreux qu'aux Pays-Bas, déplore le SER.

Le secteur a malgré tout déjà bénéficié de simplifications, notamment avec la loi "Essoc" de 2018 et la prise en charge par l'Etat des concertations publiques, désormais organisées avant désignation des développeurs.

Dans le contexte de la guerre en Ukraine, le gouvernement doit encore présenter d'ici fin juillet au conseil des ministres un "projet de loi d'accélération" des renouvelables. Mais ce texte ne concernera qu'à la marge l'éolien en mer.

Commentaires

Serge Rochain
Ailleurs ont fait des parcs éolien et en France on fait des textes, on organise les difficultés à opposer aux pionniers . Et dire que certains croient que ce n'est pas l'état qui décident de ce qui doit se faire, là où ça lui plait, et quand ça lui plait, et surtout quand il a le temps de s'occuper de ce problème secondaire, sachant qu'il doit passer des alliances pour les élections qui suivront les prochaines, ce qui est autrement plus important que le changement climatique et toutes ces bétises.
Serge Rochain
Nous ne sommes donc pas en effet en démocratie car Macron a décidé seul sans aucun débat public de faire construire 6 EPR qui seront des puits à euros, comme les précédents.
sirius
Ce que le lobby appelle "simplification "signifie opinion muselée .Et il se félicite de voir ses intérêts l'emporter sur la vie démocratique . Tout comme pour les futurs EPR .
Chantal Bourry
L'éolien offshore est trop performant pour plaire au gouvernement, qui veut relancer le nucléaire
Houyo
La France serait en retard sur la transition énergétique??!! Non, les bras m'en tombent. Nous, héritiers des lumières, qui avons la chance d'avoir les meilleurs ingénieurs et un tel gisement énergétique. Je me demande d'où ça vient... La planification de sa Jupiterité serait pleine de floue ??! Non alors là je refuse d'y croire, c'est vraiment pas le genre de la maison !
Jean BLIN
FEE et SER ont raison : Il faut accélérer la pompe à fric qui arrose leurs actionnaires (et les dirigeants des stés d'éolien). D'autant que le MWh de l'ARENH acheté à 43€ revendu bine au dessus au prix du marché libre (libre de quoi au fait ? De toute concurrence libre et non faussée peut-être ?), de telles marges, faut en profiter et planter plus vite plus de moulins à vent pour plus de fric

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