- Connaissance des Énergies avec AFP
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Les candidats au rachat d'Equans ont déposé leurs offres en début de semaine, lançant ainsi le processus de vente de cette filiale d'Engie sous l'oeil vigilant du gouvernement à l'approche de la présidentielle.
Le géant de l'énergie Engie, détenu à 23,64% par l'Etat, vient de recevoir sept offres préliminaires émanant de grandes entreprises et de fonds d'investissement pour Equans, filiale regroupant ses activités de services récemment créée en vue d'une scission.
Sont sur les rangs les groupes français Bouygues, Eiffage et Spie, les fonds américains Apollo, Bain et Carlyle, ainsi que le consortium constitué des fonds européen et français CVC et PAI Partners, selon des sources proches du dossier.
Engie, qui espère tirer 5 à 6 milliards d'euros de cette opération, a salué le "grand intérêt du marché".
Son conseil d'administration doit étudier les dossiers prochainement, avant une remise d'offres fermes par les candidats d'ici la fin novembre, ont indiqué des sources concordantes.
"Engie appréciera la solidité du projet industriel et la qualité du projet social contenues dans ces offres", ainsi que "la valorisation proposée", selon la direction.
"La discussion va être sérieuse sur le prix et les engagements sociaux", abonde une source proche du conseil d'administration.
Le chèque ne sera donc pas le seul critère dans ce dossier sous haute surveillance politique et syndicale, qui concerne 26.000 salariés en France pour 74.000 personnes au total.
"Nous sommes vigilants sur l'emploi, les enjeux de souveraineté et l'identité des futurs repreneurs", indique-t-on dans l'entourage du ministre de l'Economie, Bruno Le Maire. Bercy se dit par ailleurs d'accord sur le fond avec la stratégie d'Engie visant à se concentrer sur les énergies renouvelables et les réseaux.
- Eviter un nouveau "bazar" -
Les protagonistes ont aussi à coeur d'éviter de rejouer le scénario de la vente de la participation d'Engie dans Suez, qui avait mis au jour des différences entre l'Etat actionnaire et la direction du groupe d'énergie, et avait lancé une interminable guerre Veolia-Suez.
"Ils n'ont pas du tout envie que le même bazar recommence", assure une source chez Engie. Et le calendrier est particulièrement sensible, avec l'approche de l'élection présidentielle au printemps. Accessoirement, le président d'Engie Jean-Pierre Clamadieu remettra en jeu son mandat au même moment.
Pour Engie, l'équation devrait être simplifiée du fait de la diversité des candidats alléchés par Equans, où Engie a regroupé une majorité de ses services techniques (climatisation, chauffage et ventilation, électricité, numérique, mécanique, services généraux...)
Les entreprises et fonds candidats à la reprise essaient de se présenter sous le meilleur jour, multipliant même les rendez-vous avec les responsables syndicaux. Plusieurs ont pris des engagements publics en faveur de l'emploi.
"On envisage une croissance significative. La logique n'est pas la restructuration", a ainsi souligné le PDG de Spie, Gauthier Louette.
Chez le fonds américain Bain Capital, on promet un engagement "ferme de maintien de l'emploi sur 5 ans" et de maintien des centres de décision en France, indique une source proche.
"A date, on ne rejette aucune offre pour des raisons dogmatiques, ni celles d'un fonds, ni celles d'un groupe" mais "nous sommes attachés aux clauses sociales", indiquait cette semaine José Belo, coordinateur CFDT.
Gildas Gouvazé, coordinateur groupe FO, estime que Bouygues est "le mieux placé". "On veut être repris par quelqu'un qui a les reins solides", insiste-t-il.
Rappelant les cessions précédentes de Suez et d'Endel, Yohan Thiebaux, coordinateur CGT d'Engie, rejette lui en bloc l'opération, qui "préfigure" une "casse sociale importante" et un "démantèlement du groupe" mettant "en péril" l'avenir énergétique du pays. Il pointe notamment les "trois augmentations en trois mois" des tarifs du gaz. Selon les calculs de la CGT, les prix ont augmenté de "80%" depuis la privatisation du groupe.
"Bercy tend à durcir depuis 2-3 ans son positionnement sur la protection des actifs considérés comme essentiels à la souveraineté économique française", observe par ailleurs Nicolas Mazzucchi, de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).
"Cela risque de compliquer sévèrement la tâche si jamais Engie choisissait un acteur étranger", ajoute-t-il.