ExxonMobil s'engage à verser 1 million de dollars pour soutenir la taxe carbone aux États-Unis

  • AFP
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ExxonMobil s'est engagé mardi à verser un million de dollars pour soutenir les efforts destinés à faire adopter aux États-Unis une taxe carbone, une première pour un géant pétrolier, accusé a fortiori d'avoir financé pendant des années des études climatosceptiques.

"Nous apportons une contribution d'un million de dollars sur deux ans à American for Carbon Dividends", a déclaré à l'AFP Scott Silvestri, un porte-parole de l'entreprise.

Cette association, codirigée par deux anciens sénateurs - le républicain Trent Lott et le démocrate John Breaux - veut faire adopter par le Congrès une taxe carbone pour lutter contre le réchauffement climatique, mais fait face à des vents contraires après le retrait du pays par Donald Trump de l'Accord de Paris sur le climat.

La décision du d'ExxonMobil tranche avec des années de bras de fer avec des ONG environnementalistes, qui l'accusent entre autres d'avoir dissimulé des études scientifiques sur le rôle néfaste des énergies fossiles dans le changement climatique. Les États de New York et du Massachusetts ont ouvert des enquêtes.

Les mêmes ONG demandent par ailleurs généralement à l'entreprise de réduire ses investissements dans l'exploration de nouveaux puits pétroliers. "Nous avons toujours été partisans d'un prix du carbone neutre depuis une décennie", défend M. Silvestri. "C'est un écran de fumée", fustige May Boeve, la présidente de l'ONG environnementale 350.org, pour qui la taxe carbone soutenue par Exxon n'est pas assez élevée pour encourager des comportements vertueux.

Andrew Logan, directeur de l'ONG Ceres, estime à l'inverse que le virage d'ExxonMobil est "un petit pas dans la bonne direction". Il "pourrait normaliser au sein des républicains l'idée d'une politique climatique", argue celui dont l'ONG fait pression sur les groupes énergétiques, via des résolutions déposées en assemblée générale, pour embrasser les initiatives contre les émissions de CO2.

1 million de revenus toutes les 2 minutes

La "taxe dividende carbone" soutenue par ExxonMobil serait fixée à 40 dollars la tonne de CO2 et augmenterait progressivement. Concrètement, le prix du gallon d'essence (3,78 litres) à la pompe serait augmenté de 36 cents, ce qui rapporterait initialement 200 milliards de dollars dans les coffres publics.

Cette somme serait par la suite redistribuée aux ménages, soit en moyenne 2 000 dollars par famille de quatre personnes, sous différentes formes (abondement des plans de retraite, paiement de dividendes...). La taxe affecterait la plupart des secteurs économiques liés ou exposés aux énergies fossiles et permettrait, selon ses défenseurs, de réduire les émissions américaines.

L'une des dispositions l'accompagnant vise toutefois à protéger les groupes pollueurs de poursuites judiciaires. Des "ajustements aux frontières" sur des biens importés de pays ne disposant pas d'une "taxe-dividende carbone" seraient également effectués.

C'est la première fois qu'une grande entreprise pétrolière américaine apporte son soutien financier à une action de lobbying pro-climat aux États-Unis. Si Rex Tillerson, éphémère secrétaire d'État de Donald Trump et ancien PDG d'ExxonMobil, s'était dit favorable en 2009 à une taxe carbone, le groupe texan n'avait jamais apporté de fonds à une mesure publique allant dans ce sens.

Son soutien intervient au lendemain de l'attribution du prix Nobel d'économie aux Américains William Nordhaus et Paul Romer, qui intègrent le changement climatique dans leurs modèles.

Un million de dollars représente les revenus engrangés par ExxonMobil toutes les deux minutes en 2017, selon les calculs de l'agence Bloomberg. Le groupe a par ailleurs consacré 11,4 millions de dollars à ses activités de lobbying l'an dernier.

Les groupes pétroliers européens BP, Total et Royal Dutch Shell sont également favorables à une taxe carbone et faisaient partie, avec ExxonMobil, des grandes entreprises ayant acheté en juin 2017 des pages de publicité dans des médias aux Etats-Unis pour défendre cette proposition.

Hors énergie, PepsiCo, General Motors, Schneider Electric, Santander, Procter & Gamble, Unilever et Johnson & Johnson apportent également leur voix à cette solution de "taxe dividende carbone".

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