Glencore tente une scission du charbon avec son offre au groupe canadien Teck Resources

  • AFP
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Le géant suisse des matières premières Glencore a essuyé de vives critiques pour sa stratégie dans le charbon mais tente une sortie de cette activité qui n'a plus la cote auprès des investisseurs à travers une offre à Teck Resources.

Mais ce groupe minier canadien est déjà en train d'organiser la propre scission de ses activités de charbon et a repoussé à deux reprises les avances de son concurrent suisse.

Scission du charbon chez Teck

En février, le groupe canadien, qui emploie 11 000 personnes, a proposé de se séparer de ses activités dans le charbon métallurgique, utilisé pour produire de l'acier, en les regroupant dans une nouvelle entreprise appelée Elk Valley Resources (EVR) qui sera cotée séparément à la Bourse de Toronto.

Le groupe conservera le zinc et le cuivre et se rebaptisera Teck Metals. Les métaux ont un potentiel de croissance important puisqu'ils sont très demandés pour la transition énergétique, explique le groupe canadien, même si le charbon a contribué à 60% de ses 17,3 milliards de dollars canadiens (11,7 milliards d'euros) de chiffre d'affaires en 2022, en raison de l'envolée de son prix après l'invasion de l'Ukraine.

Ses actionnaires se voient proposer 1 action EVR pour 10 actions Teck Resources ainsi qu'un versement en numéraire de 0,39 dollar par titre, soit un montant total de 200 millions de dollars. Ils doivent se prononcer en assemblée générale extraordinaire le 26 avril.

Le géant sidérurgique japonais Nippon Steel Corporation, qui détient une participation minoritaire dans un site de Teck Resources en Colombie-Britannique prévoit d'investir plus d'un milliard de dollars pour obtenir une participation de 10% dans EVR. Son concurrent sud-coréen Posco compte prendre une participation de 2,5%.

Contre-proposition de Glencore

Mais début avril, Glencore a dévoilé une offre valorisant Teck Resources à plus de 22,5 milliards de dollars, soit une prime de 20% par rapport à son cours de clôture le 24 mars. Glencore propose de rassembler leurs activités et de simultanément les scinder pour créer une entreprise spécialisée dans les métaux appelée MetalsCo et une autre dans le charbon, baptisée CoalCo.

Ensemble, elles disposeraient d'une plus large assise, argumente le groupe suisse, qui souligne que MetalsCo s'appuierait aussi sur ses activités dans le cobalt et le nickel.

Teck Resources a immédiatement refusé, avertissant qu'un tel rapprochement ferait entrer dans ses activités le charbon thermique de Glencore. Utilisé pour produire du courant et de la chaleur, le charbon thermique suscite beaucoup plus de critiques en raison de ses émissions de CO2 et de sa contribution au changement climatique.

Norman Keevil, le patriarche de la famille qui contrôle une partie des actions de classe A de Teck Resources (qui disposent de davantage de droits de vote), a lui aussi refusé, affirmant que le moment n'est pas choisi "pour une transaction de cette nature".

« Rançon » pour acheter du charbon

Le 11 avril, Glencore a révisé son offre, proposant aux actionnaires qui veulent sortir du charbon de recevoir 24% de MetalsCo et un versement en numéraire d'un montant total de 8,2 milliards de dollars. Teck Resources a de nouveau refusé.

Le groupe chinois China Investment Corporation, qui détient une participation de 10% des actions de classe B, serait toutefois favorable à cette offre, selon l'agence Bloomberg, qui cite des sources proches du dossier sans les nommer. Avec cette offre sur Teck Resources, il y a "maintenant" chez Glencore "une intention claire d'agir sur l'abandon des actifs dans le charbon thermique", s'est félicité Varun Sikka, analyste chez Baader Helvea, dans un commentaire de marché.

Le fonds activiste Bluebell Capital, qui fait pression depuis novembre 2021 pour que Glencore se sépare du charbon, désapprouve toutefois la forme de la transaction. Proposer 8,2 milliards revient "à demander une rançon aux actionnaires de Glencore pour acheter encore plus de charbon et ensuite s'en séparer. C'est absurde", fustige Giuseppe Bivona, partenaire et cofondateur de ce fonds, lors d'un entretien avec l'AFP. Il préférerait que Glencore commence par se séparer de ses propres activités dans le charbon, quitte à discuter ultérieurement d'un rapprochement avec EVR.

Dans une lettre aux dirigeants de Glencore, ce fonds activiste, qui ne divulgue ses participations ni dans Teck Resources ni dans Glencore, a jugé la transaction "illogique" et "mal structurée".

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