Transition énergétique : investissements à Dunkerque, la joie après 30 ans de désindustrialisation

  • AFP
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"Ici, on sort l'équivalent d'une Tour Eiffel d'acier par jour, et on va pouvoir continuer !": Au haut fourneau numéro quatre d'ArcelorMittal à Dunkerque, l'annonce de gros investissements pour décarboner et moderniser l'usine a provoqué un "profond soulagement" après des années de désindustrialisation.

La coulée de fonte incandescente avance. Dans le sombre atelier-cathédrale, les ouvriers sidérurgistes ont revêtu des manteaux ignifugés argentés tout neufs pour accueillir leurs invités : le Premier ministre Jean Castex, accompagné de la ministre de l'Industrie Agnès Pannier-Runacher et de sa collègue de la Transition écologique Barbara Pompili, sont venus leur annoncer de bonnes nouvelles.

ArcelorMittal, aidé de l'Etat, va investir 1,7 milliard d'euros d'ici à 2027 dans cette usine, la plus importante d'Europe pour le groupe, et dans celle de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre et verdir son acier. "Ce qui veut surtout dire que la production d'acier va pouvoir continuer à Dunkerque" traduit le maire divers-gauche de la ville Patrice Vergriete, qui dit ne pas avoir connu "de politique industrielle volontariste comme celle-ci depuis les années 70". "On est reparti pour un demi-siècle ! Presque 40 ans qu'on se bat pour entendre ça" ajoute François Lavallée, président de la chambre de commerce et d'industrie de la ville, qui n'a pas oublié le traumatisme causé par la fermeture des chantiers de France à Dunkerque il y a une trentaine d'années, avec la disparition de 4 500 emplois.

"Après l'annonce de l'implantation à Dunkerque de l'usine de batteries électriques Verkor lundi", c'est un "tournant de l'histoire industrielle du pays" (...) "et même de la planète", avance pour sa part le Premier ministre en se disant "impressionné par la beauté industrielle" du haut fourneau qu'il vient de visiter.

Le géant de l'acier, qui avait fermé dans la douleur deux haut fourneaux à Florange en Moselle en 2012, va remplacer progressivement au cours des cinq ans à venir trois de ses cinq hauts fourneaux français restant (à charbon) par des fours électriques. À Dunkerque, il va aussi recourir à l'hydrogène -au lieu du charbon- pour désoxygéner ou purifier le minerai de fer, grâce à une technique appelée "réduction directe".

Défis technologiques et financiers

L'usine va considérablement réduire sa consommation annuelle de charbon qui s'élève à quelque 4,5 millions de tonnes, acheminé d'Australie et de Russie, souligne Thierry Flamand, chef de l'établissement. Et Dunkerque, la ville qui émet le plus de CO2 en France, va respirer. L'opération à terme va supprimer 10% des émissions industrielles de la France, et 2% de ses émissions totales de dioxyde de carbone.

Sur le papier, l'opération parait simple. Mais il s'agit d'une "révolution industrielle" qui comporte plusieurs "sauts technologiques" et des "risques", soulignent des responsables du groupe. Raison pour laquelle l'État, en accord avec Bruxelles, accompagne la "transition" négociée depuis plusieurs mois.

Le montant exact de l'aide publique n'est pas connu encore, car il dépend d'un montage complexe d'achats de "crédits carbone" non émis, en cours de conception avec Bruxelles. Jeudi soir, Matignon avait annoncé une enveloppe de 5,6 milliards d'euros issue du plan d'investissement France 2030 pour aider au financement de la décarbonation des trois secteurs d'industrie lourde qui participent le plus au réchauffement de la planète : l'acier-aluminium, la chimie et le ciment. Pour le Premier ministre, il s'agit de faire "à la fois" la "transition écologique sans renoncer au progrès économique et social". De décarboner tout en réindustrialisant.

Outre les défis technologiques et financiers, deux questions restent en suspens, autour de l'emploi et de l'alimentation en électricité. La fermeture des haut fourneaux classiques ne va-t-elle pas occasionner de suppressions d'emplois ? L'usine emploie 3 200 salariés en interne ainsi que 1 500 en maintenance externe. "On a les moyens au sein de l'entreprise de faire évoluer les compétences des salariés" veut croire Pascal Deshayes, responsable CFE-CGC. "Un des grands sujets à traiter va être celui de la formation" ajoute M. Lavallée.

L'alimentation en électricité reste aussi à régler, car les nouvelles installations en demanderont énormément. "Raison pour laquelle, nous espérons aussi une annonce d'EPR à Dunkerque" ajoute le président de la chambre de commerce.

Commentaires

Serge Rochain

Ne comptez pas trop sur le nucléaire, il va mettre beaucoup de temps à venir, et participant au pillage des ressources de la planète en transformant sa matiere en chaleur, il n'en disposera plus pour très longtemps une fois en état de commencer à participer au pillage.
Le vent, vous l'avez pour l'éternité.

goldorak

Le projet en lui même va déjà demander du temps, donc d'ici qu'il soit fait le projet peut etre lancé.
Et même en dehors de ça, Il faudra bien remplacer à un moment donné les réacteurs de Gravelines qui ne sont plus tout jeunes.
Concernant le vent, il me semble qu'il y a déjà un projet en cours d'éolienne en mer près de dunkerque
Rien ne sera pas de trop vu l'état du réseau actuel et de ce qui nous attend

Serge Rochain

Non, comme vous dites il va demander du temps. 5 ans pour savoir ce qu'on va faire entres les fantomatiques EPR2 et les non moins illusoires SMR déjà recalés à la fin des années 50 malgré leur brillante carrière dans la marine nationale, notamment les sous-marin d'attaque car trop cher pour l'électronucléaire civil, ensuite 15 ans de construction avant mise à feu soit 2042. Ensuite il faudra au minimum 50 ans d'exploitation pour amortir l'investissement, nous sommes rendus à 2092.... MAIS ! Il y a un Mais !
D'après les experts géologues dont les chiffres sont repris par l'EIA en 2068 nous aurons atteint les fonds de tiroir de l'uranium accessible dont la date est déterminée par l'équation suivante ;
Publication de 2020 : Réserve accessible 3,3 millions de tonnes. Consommation annuelle mondiale 68500 tonnes. Si l'EIA compte bien cela fait une disponibilité de 48 ans au rythme de la consommation actuelle, mais, il y a encore un Mais. Le bruit court que pour décarboner les transports, l'industrie et le résidentiel il faut multiplier notre production d'électricité par un facteur compris entre 2 et 3 selon les pays, ce qui ramènerait ainsi le mur de la disponibilité à 2044. Si ce bruit n'en n'est pas un mais devient une réalité, il faudra amortir nos nouveaux réacteurs en .....DEUX ANS !
Faut-il vraiment le lancer ?
Et comme il faudra bien remplacer tous nos vieux réacteurs, en les vitaminant on peut les faire tenir 10 à 15 ans de mieux. C'est le temps que nous avons devant nous pour trouver une solution qui tient la route au-delà de la durée de vie de l'uranium terrestre.
On sait car on le prouve régulièrement que l'on sait construire n'importe quel parc éolien ou solaire ou un méthaniseur ou un pyrogazéificateurs en deux ans et qu'on peut en construire autant qu'on en veut en même temps.... Où donc est le problème ?

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