La panne à Atlanta, symbole d'infrastructures américaines en piteux état

  • AFP
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La panne d'électricité, qui a paralysé dimanche l'aéroport d'Atlanta, illustre l'état calamiteux des infrastructures aux Etats-Unis dont la modernisation se fait attendre malgré les promesses de campagne de Donald Trump.

L'origine du dysfonctionnement n'était pas clairement établie lundi, la compagnie d'électricité Georgia Power faisant état d'un "incident rare" et évoquant un incendie ayant endommagé des câbles. Mais cette panne, qui a plongé dans le noir l'aéroport le plus fréquenté du monde pendant onze heures, provoquait encore lundi des centaines d'annulations de vols.

"C'est le symbole d'un malaise très profond dans la société américaine car il n'y a tout simplement pas eu, depuis de très nombreuses années, de dépenses suffisantes consacrées aux infrastructures de base du pays", résume Jacob Kirkegaard, expert à l'institut de recherches économiques de Washington, le Peterson Institute.

"Il illustre un déclin qui s'accélère" et concerne non seulement les aéroports mais encore toutes les principales infrastructures des Etats-Unis: les autoroutes, les ponts, les ports, les rails et les tunnels, souligne-t-il.

Lundi, un déraillement d'un train de passagers au nord d'Olympia la capitale de l'Etat de Washington, qui a fait plusieurs morts, est venu s'ajouter à la liste. Une photo montrait au moins une voiture du train tombée d'un pont surplombant la principale artère reliant Olympia à Tacoma, dans cet Etat du nord-ouest des Etats-Unis. La cause de l'accident restait inconnue lundi vers 17h00 GMT.

Le problème est ancien et largement connu. Plusieurs catastrophes ferroviaires (Philadelphie en août, Hoboken en janvier), l'effondrement d'un pont à Minneapolis (en 2007) étaient déjà venus le rappeler aux côtés de pannes à répétition du métro à Washington, des autoroutes du pays congestionnées ou encore d'un système d'acheminement et de traitement d'eau obsolète.

Problème très ancien

L'association des ingénieurs civils américains (ASCE) tire la sonnette d'alarme depuis longtemps. Dès 1998, elle a ainsi attribué aux infrastructures la note D (pour "déficientes") sur une échelle allant de A à F. Elle a aussi chiffré à quelque 3.600 milliards de dollars d'ici à 2020 les besoins totaux d'investissements pour les moderniser.

"Nous allons reconstruire nos autoroutes, nos tunnels, nos aéroports, nos écoles, nos hôpitaux", avait promis Donald Trump le soir de sa victoire le 8 novembre 2016, les qualifiant d'équipements "du tiers monde".

L'administration Trump avait ensuite indiqué que 550 milliards de dollars seraient investis pour relancer une croissance américaine morose et rénover des infrastructures "négligées pendant trop longtemps".

"Qu'a fait l'administration Trump depuis janvier? Absolument rien", constate Jacob Kirkegaard, relevant que le principal instigateur d'une politique de modernisation des équipements du pays était Steve Bannon, l'ancien conseiller du président congédié le 18 août. La Maison Blanche a aussi abandonné son projet de conseil des infrastructures.

"Trump a clairement mis le doigt sur un problème", reconnaît toutefois M. Kierkegard. Pour autant, rien ne se concrétise. Il note également qu'il n'a jamais été question pour la Maison Blanche de procéder à des dépenses publiques. "L'administration Trump a proposé des réductions d'impôts supplémentaires pour les investisseurs privés afin qu'ils investissent dans les infrastructures", explique-t-il, doutant d'un quelconque effet.

En attendant, plus de deux millions de passagers transitent chaque jour sur les aéroports américains. "La congestion des aéroports s'accroit; 24 des 30 plus importantes plateformes vont bientôt expérimenter +le pic observé à Thanksgiving+ au moins une fois par semaine", selon l'association des ingénieurs civils qui a chiffré à 42 milliards les besoins d'investissement pour la prochaine décennie. Thanksgiving à la fin novembre est aux Etats-Unis le weekend qui voit le plus de déplacements.

Pour 2018, les subventions publiques fédérales en faveur de l'amélioration des aéroports ne devaient, elles, représenter que quelque 3,4 milliards contre 2,9 milliards en 2017. C'est aujourd'hui essentiellement une taxe sur le kérosène qui finance le développement des plateformes aéroportuaires.

"La détérioration de nos infrastructures entrave notre capacité à être compétitif dans une économie mondiale florissante", a aussi prévenu l'ASCE.

"Il faut sans doute que cela empire avant que cela ne s'améliore", conclut Jacob Kirkegaard, qui s'attend à l'avenir à d'autres incidents semblables à celui survenu à Atlanta.

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