Le plus grand campus d'Europe construit en bois se prépare à ouvrir en France

  • AFP
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"Ici, on a voulu donner aux escaliers le premier rôle": la phrase n'est pas banale pour présenter des bâtiments en bois, non loin de la forêt de tours de béton du quartier d'affaires de La Défense, à l'ouest de Paris, où les ascenseurs servent normalement de lieux de convivialité.

Le quartier Arboretum, qui doit être livré prochainement dans un parc de 9 hectares au bord de la Seine, veut casser les codes.

Il se présente comme le plus grand campus tertiaire en bois massif d'Europe, porté par la société immobilière WO2, un promoteur spécialisé dans les projets "bas carbone" dont les actionnaires sont des fonds de pension québécois, la Caisse des dépôts ou l'assureur Allianz.

Outre deux anciens bâtiments industriels en béton et briques -d'anciennes usines de papeterie Smurfit recyclées en club sportif et centre de conférences -, le complexe présente cinq immeubles neufs de bureaux de sept à huit étages, dont les façades sont zébrées de larges escaliers de bois qui s'envolent de terrasses en terrasses.

L'investissement s'élève à quelque 550 millions d'euros pour financer notamment 20.500 mètres cube de bois lamellé contre-collé, "aussi solide que le béton", soit une petite forêt.

Le matériau n'est pas local. Il vient d'Autriche, livré par la société finno-suédoise Stora Enso. Aucun acteur français n'avait la capacité industrielle de livrer cela. Même pour Stora Enso, plus habitué, il s'agit du plus grand projet immobilier tout en bois jamais réalisé, indique Lars Völkel, le patron allemand de la division bois du groupe de matériaux.

Pour lier les planches, "nous n'utilisons que de la colle durable sans effet sur la santé", assure-t-il.

- Pas encore zéro carbone -

"Le bois, couplé avec la géothermie pour le chauffage et le réemploi de matériaux pour certains pavages extérieurs, nous a permis de diviser par deux l'empreinte carbone du complexe par rapport à un projet classique en béton," affirme Guillaume Poitrinal, fondateur de WO2, qui reconnaît néanmoins qu'il y a "encore des efforts à faire pour arriver à zéro carbone".

"Ce type de bâtiment pourrait exister partout en Europe si des législations standardisées comme celle qui a été adoptée en France se développaient", relève pour sa part M. Völkel.

La visite du site organisée pour la presse avant son inauguration coïncide avec la tenue à Paris jusqu'à vendredi soir du premier "Forum bâtiments et climat", destiné à revoir les façons de construire au plan mondial pour décarboner le secteur de la construction, tout en rendant les bâtiments plus résilients face aux aléas climatiques, dont les canicules.

Le complexe Arboretum répond aux nouvelles normes de construction RE2020, en vigueur depuis janvier 2022 en France, premier pays du monde à adopter des règles climatiques de ce niveau, et évolutives dans le temps.

"On nous demande une performance en consommation d'énergie, et en émissions de CO2 sur toute la durée de vie du bâtiment, de sa construction à sa disparition, et on nous laisse trouver les solutions techniques" explique M. Poitrinal. Selon lui, le béton, très fortement émissif du CO2 qui réchauffe la planète, doit être réservé aux infrastructures lourdes comme les souterrains, les barrages ou les ponts.

Ici, les bâtiments parient sur une certaine simplicité, sans faux plafonds ni toits végétalisés gadgets, mais il y a un potager et un verger au pied des tours. Les parkings sont censés accueillir 1.400 voitures et 1.600 vélos.

Pour l'instant le jardin dort encore dans ses paillages hivernaux. Quelques pieds d'artichauts émergent. "Nous voyons arriver des passereaux et des mésanges", se réjouit le jardinier.

Reste à voir arriver des locataires. Une tâche délicate alors que des tours entières sont vides à quelques centaines de mètres.

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