Les cinq sujets qui fâchent au sein du couple franco-allemand

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Le report à janvier d'un Conseil franco-allemand a montré mercredi l'ampleur des désaccords, militaires et énergétiques en particulier, entre Paris et Berlin.

. Plafonnement européen du prix du gaz

La France a commencé pour la première fois mi-octobre à acheminer directement du gaz vers l'Allemagne. Mais derrière ce symbole fort de solidarité se livre en coulisse un bras de fer à l'échelle européenne sur le plafonnement du prix du gaz.

La première économie européenne, particulièrement énergivore, s'oppose à ce mécanisme craignant que les vendeurs de gaz se tournent vers d'autres marchés si on leur impose un prix maximum..

Emmanuel Macron plaide lui, comme 14 autres Etats membres, pour un plafonnement.

La situation énergétique nourrit d'autres tensions entre les deux pays, l'Allemagne n'hésitant pas par exemple à dénoncer en septembre l'état des centrales nucléaires françaises, qui obligerait Berlin à compenser les manques avec de l'électricité provenant de centrales au gaz.

. Le nouveau gazoduc de la discorde

Madrid et Berlin, soutenus par Lisbonne et des pays d'Europe centrale, militent pour la relance d'un projet de gazoduc reliant l'Espagne à l'Allemagne.

Baptisé MidCat, initié en 2013, il avait été stoppé en 2019 en raison de son impact environnemental et d'un intérêt économique alors jugé limité.

Le gazoduc pourrait permettre d'acheminer du gaz, provenant sous forme de GNL des Etats-Unis ou du Qatar, voire de l'"hydrogène vert".

Mais Emmanuel Macron ne l'entend pas de cette oreille: "Je ne comprends pas pourquoi on sauterait comme des cabris des Pyrénées sur ce sujet pour expliquer que ça résoudrait le problème gazier", a-t-il récemment cinglé.

Outre le coût environnemental, la France serait en outre tentée de vendre elle-même du gaz à l'Allemagne.

. Le cavalier seul allemand en Europe

L'époque où Angela Merkel et Emmanuel Macron dégainaient ensemble, en mai 2020, un plan de relance de l'Europe, paralysée par le Covid, semble révolue.

En témoigne le plan de 200 milliards d'euros dévoilé par le chancelier Scholz fin septembre pour amortir l'envolée des prix de l'énergie. Un plan qui trouve peu de précédents dans une Allemagne soucieuse de ses comptes publics et qui a agacé ses partenaires européens.

La France en particulier n'a pas été mise dans la confidence malgré les contacts réguliers entre les deux dirigeants.

Les pays de l'UE craignent que ce cavalier seul fragmente un peu plus une Europe à plusieurs vitesses. Ils goûtent en outre peu le double-discours allemand: plaider l'austérité à Bruxelles et s'opposer à des dettes communes, tout en dépensant elle-même sans compter.

Olaf Scholz souligne de son côté que son plan s'inspire d'autres dispositifs en vigueur en Europe, en France en particulier où l'Etat finance un plafonnement des prix de l'énergie.

. Le bouclier anti-missile

C'est une épine récente dans la relation franco-allemande. Olaf Scholz a annoncé cet été que l'Allemagne allait se doter d'un bouclier anti-missile et anti-aérien, assemblage de systèmes européen (Iris-T), américain (Patriot) et, potentiellement, israélien ("Dôme de fer", développé par l'entité Rafael).

Ce futur "Bouclier du ciel européen" a depuis séduit 14 pays de l'Otan, dont le Royaume-Uni, les pays baltes ou encore la Belgique et les Pays-Bas, la Finlande et la Norvège.

Mais si ce projet suscite l'enthousiasme de l'Alliance, il n'enchante guère l'Elysée, où un conseiller s'alarme d'une éventuelle "relance de la course aux armements en Europe".

La France préfère continuer de miser sur son système de défense sol-air de moyenne portée MAMBA.

. L'avion de combat européen

C'est devenu un serpent de mer de la relation franco-allemande: le Système de combat aérien du futur (Scaf), porté notamment par Paris et Berlin, stagne depuis un an. Ce projet, lancé en 2017 et censé remplacer en 2040 les Rafale français et Eurofighter allemands et espagnols, est victime de querelles sur le partage des tâches entre Paris, Berlin et Madrid.

Les contrats permettant d'engager cette nouvelle phase n'ont toujours pas été passés, faute d'accord entre le Français Dassault Aviation et son partenaire principal Airbus, représentant les intérêts de l'Allemagne et de l'Espagne.

"Politiquement, on est d'accord, ça coince au niveau des entreprises. Dassault a peur de perdre sa position sur le marché", décrypte un responsable français.

Le gouvernement français a encore assuré en septembre que ce futur avion "se ferait". Mais il est devancé par le Tempest, un projet concurrent porté par la Grande-Bretagne.

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