Pétrole russe : quel serait l'impact d'un arrêt des importations américaines ?

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La pression monte sur le gouvernement Biden pour décréter un embargo sur les importations de pétrole russe aux Etats-Unis, une décision qui priverait le marché américain de plusieurs centaines de millions de barils par an et le contraindrait à trouver d'urgence une offre de substitution, chez lui ou plus probablement ailleurs.

Quelle quantité de pétrole russe importent actuellement les États-Unis ?

En 2021, ce sont quelque 245 millions de barils de brut et produits pétroliers (8% du total des importations) qui ont alimenté le marché américain en provenance de Russie, qui était le quatrième fournisseur des États-Unis. C'était le chiffre le plus important jamais enregistré.

Pourquoi les États-Unis importent-ils du pétrole russe ?

Devenu exportateur net (exportation supérieures aux importations) en 2020, une première dans l'ère moderne, les États-Unis le sont restés en 2021. Premier producteur mondial, ils n'en ont pas moins importé environ trois milliards de barils l'an dernier.

Côte ouest et côte est des États-Unis complètent plus facilement leurs besoins avec des importations qu'en s'appuyant sur le pétrole produit aux Etats-Unis, pour des questions logistiques, selon l'association des producteurs de carburant et de produits pétrochimiques (AFPM).

Quel serait l'impact sur les prix de l'énergie aux États-Unis ?

Il est déjà effectif, car la Russie est l'objet, depuis la semaine dernière d'un quasi-embargo pétrolier de fait, explique Andy Lipow, du cabinet Lipow Oil Associates. Aux États-Unis, le prix du gallon d'essence (3,78 litres) a franchi dimanche 4 dollars et se rapproche de son record absolu (4,11 dollars), qui date de 2008.

Outre le prix de l'essence, la hausse du cours du pétrole "va être répercutée aux consommateurs" via les frais de chauffage, le prix des billets d'avion, les coûts de livraison et ceux de "tas de produits faits avec du pétrole", notamment le plastique, annonce M. Lipow.

Les États-Unis ont-ils les capacités pour compenser les importations russes ?

Sur le papier, les États-Unis disposent des réserves suffisantes pour pomper l'équivalent des barils russes perdus. Mais les capacités de production sont, pour l'heure, insuffisantes. Avec la pandémie de coronavirus, les compagnies pétrolières ont brutalement ralenti l'extraction, qui ne reprend que progressivement depuis l'an dernier et reste inférieure de 1,5 million de barils par jour à son niveau de mars 2020 (11,6 millions contre 13,1 il y a deux ans).

"Les producteurs ont été très prudents vis-à-vis de cette hausse des prix", explique Stephen Schork analyste et auteur du Schork Report. "Ils sont frileux à l'idée d'investir dans de nouveaux forages", dont le coût, en période de forte inflation, serait très élevé, avec une mise en œuvre plus longue du fait des problèmes actuels d'approvisionnement en matériaux et équipements. "Et sachant à quel point ce marché est volatil, il n'y a pas de garantie de retour sur investissement", ajoute l'expert.

À la recherche d'alternatives : Iran, Venezuela ?

Première source étrangère de pétrole pour les États-Unis (61% des volumes), le Canada pourrait augmenter ses exportations vers son voisin américain, comme l'a déjà proposé, samedi, dans un tweet, la ministre de la province canadienne d'Alberta, Sonya Savage.

Selon plusieurs médias américains, le gouvernement Biden a repris récemment contact avec le président vénézuélien Nicolas Maduro pour étudier l'assouplissement éventuel des sanctions qui visent le pays depuis 2019.

Par ailleurs, les États-Unis négocient activement avec l'Iran la relance de l'accord de 2015 sur le programme nucléaire iranien. Un succès permettrait de lever les sanctions sur le pétrole iranien et d'ajouter 1,3 à 1,5 million de barils par jour sur le marché, selon Andy Lipow.

Selon plusieurs médias américains, les conseillers de Joe Biden étudient aussi la possibilité d'un déplacement en Arabie Saoudite, pour tenter de convaincre le royaume de produire davantage d'or noir, ce qu'il s'est pour l'instant refusé à faire malgré la flambée des prix.

Quelles conséquences pour Joe Biden ?

L'accélération des prix du pétrole et de l'essence attiserait l'inflation, déjà au plus haut depuis 40 ans et qui vaut au chef de l'Etat américain de nombreuses critiques.

Dans le même temps, la suppression des importations russes mettrait en lumière les réticences de Joe Biden à pousser les pétroliers américains à pomper davantage, pour favoriser la transition énergétique. Cette position lui vaut déjà de nombreux reproches dans le camp républicain.

"Vous voulez rendre le pétrole (russe) inutile ? Montrer à Poutine que vous n'en avez pas besoin. C'est ce que permettra l'accélération de la transition énergétique", fait valoir Mark Brownstein, vice-président du fonds de défense de l'environnement (EDF).

Les États-Unis peuvent-ils convaincre les Européens de les suivre ?

Environ 30% des besoins de l'Europe en pétrole sont assurés par la Russie, contre 8% seulement pour les États-Unis. Lundi, le chancelier allemand Olaf Scholz a marqué son désaccord avec un éventuel embargo, estimant que l'approvisionnement de l'Europe "ne (pouvait) pas être assuré autrement pour le moment".

Commentaires

Astarroth
rump a raison, Poutine est plus intelligents que ses homologues européens, son piège va se refermer sur l'Europe et l'OTAN et va lui permettre de reprendre les pays baltes et pourquoi pas jusqu'a la Pologne. Les blocus économique va nous revenir comme un, boomerang, plus de gaz, plus de blé, plus de pétrole, les populations vont subir de plein fouet des restrictions et des prix insoutenables qui vont agiter les conflits sociaux internes a tous les pays. Les entreprises étranglées vont licencier a tour de bras et les investisseurs vont quitter l'Europe vers les USA plus surs et plus à l'abri. Les gouvernements vont se retrouver fragilisés ente le marteau russe et l'enclume des peuples en colère... L'OTAN n'aura plus les mains libres pour agir et l'Europe après avoir bu la tasse Covid, la tasse Syrie, va se coucher devant les banques pour doubler voire tripler leur dette intérieure... Poutine va nous mettre échec et mat J’espère de tout cœur me tromper mais j'en doute
APO
@Astarroth, L'URSS s'est fait "chier" avec la Pologne et les pays Baltes pendant plus de 40 ans (opposition, fuite d'information, sabotage à divers niveaux, etc...). A part à y faire de nouvelles "opérations" d'épuration, les Russes ne peuvent pas prendre ses pays qui font de plus partie de l'OTAN. LA cas de l'Ukraine est (hélas) profondément différent... Beaucoup de Russes ont migré en Ukraine sous l'ère soviétique et même avant, notamment le Donbass que l'on peut comparer à une "Ruhr" à la mode soviétique et/ou le "Nord" de la France. Ces 2 régions européennes de l'ouest ont aussi accueilli beaucoup de migrants (Nationaux et internationaux)... Cette situation, plus d'innombrables autres aspects (par exemple les massacres de grande ampleur d'Ukrainiens par les Russes soviétiques et aussi d'Ukrainiens/Russes par les Nazis et leurs alliés/supplétifs...) font que certaines parties de l'Ukraine ressemblent plus à la Yougoslavie qu'à la Pologne et/ou les pays Baltes... A votre propos sur le "boomerang,", oui c'est un risque notable. On pourrait même parler de "Grand sabordage" Européen, avec tout le monde européen qui coulerait... Cela va "amuser" les Chinois quelque part... Toutefois, les Russes ne doivent pas oublier que Vladivostok était une ville "Mandchoue" avant les guerres de l'opium en Chine (toujours dans la mémoire des élites chinoises), et qu'à l'époque l'Empire Chinois était dirigé par des "Mandchous"... Le Fleuve "Amour" et ses abords furent le lieu de différents conflits Sino-Russe (anciens et même assez récents sous l'URSS...), et la Chine a besoin de Terres agricoles pour sa population... Dans beaucoup de configuration la Chine actuelle gagnera beaucoup de la situation en Europe, que ce soit en position d'arbitre ou de fossoyeur... Je suis assez d'accord avec votre analyse que l'Europe risque très gros dans ce conflit ignoble et atroce... Pour l'échec et mat que vous mentionnez, je mettrais un bémol, on peut dire que les Slaves ont les "échecs" dans le sang, c'est quasi inné chez eux mais au sens propre du Jeu et au sens premier du mot échec aussi... Pour l'instant, l'Europe de l'Ouest subit un échec et a répondu mettant aussi les Russes en position d'échec sur certains sujets... Va t'on vers une partie nulle pour les 2 parties européennes (mais gagnantes pour les USA et Chinois, voir Japonais qui sont toujours "techniquement" en Guerre avec la Russie pour les iles au Nord du Japon...) je dirais très probablement une partie négative pour toute l'Europe - peuples et Nations (hélas !)...
APO
Pour faire plus réaliste sur le "merdier" au Donbass, j'aurais du mentionner l'Alsace-Lorraine* à la place du Nord de la France dans : "" notamment le Donbass que l'on peut comparer à une "Ruhr" à la mode soviétique et/ou le "Nord"* de la France. "" L'Alsace-Lorraine fut une région de l'Europe au centre et en partie à l'origine de plusieurs conflits sanglants sans aucun gain réel pour les populations environnantes et même pour ses régions elles-mêmes... Et la "Ruhr" ne devint vraiment allemande qu'avec la création de l'Allemagne en tant que "Etat-Nation" en 1871 dans la Galerie des Glaces de Versailles...
Guillaume
Bonjour, ces risques existent, cependant concernant la Chine en tant "qu'usine du monde", je crois qu'ils ont pour le moment besoin d'exporter en Occident leurs produits en tous genres. Cela pourrait jouer dans leur volonté de ne pas trop se mettre les occidentaux à dos en s'alliant davantage avec la Russie, laquelle est tentée d'exporter son gaz en Chine plutôt qu'en Europe. Je crois aussi que l'Europe ne doit pas sous-estimer ses capacités de production agricoles et industrielles y compris en réindustrialisant. Il y a peu, la France était une puissance de premier ordre en matière agricole ! Il se pourrait ainsi que cette situation mette un coup de frein à la mondialisation des échanges, quand bien même il existe des interdépendances et en matière d'énergie et de minerais...
APO
Les Chinois sont de très fins stratèges (pas forcément amateur d'échecs mais plus de "Jeu de Go" et pas de Jeux de Gogo!!!)... Leur marché intérieur devient colossal et leurs exports nous sont nécessaires à nous Européens !!! Imaginez un blocus des Jeux pour enfants chinois pour le prochain Noel !? Les pieds des sapins Européens seraient assez clair-semés !!! Les Chinois apprécient les relations et échanges pas trop déséquilibrés, il faut y faire attention d'ailleurs pour les panneaux PV Chinois, le jour ou ils ne verront plus d'intérêt à ces échanges, ils les réduiront pour diverses raisons (de façade et de stratège !!!). Pour l'instant, ils achètent des machines-outils allemandes, des voitures, des produits de Luxe, des Airbus et quelques autres ressources ... (sans compter les échanges universitaires et de compétences bien entendus...). Je ne suis pas sur que nous aurons beaucoup de choses "essentielles" à leur offrir dans 10-15 ou 20 ans (Avis personnel) mise à part le domaine nucléaire... Il faut y penser et le méditer... Ils risquent de nous jeter telles des "vieilles chaussettes puantes et sales" dans pas si longtemps ! Les capacités agricoles russes sont sous-exploitées à l'échelle de leur vaste territoire et du fait du changement climatique en court cela leur ouvre de nouveaux espaces propices (y compris dans la vaste zone sous-peuplée & sous-développée au Nord de la Chine !)... En Europe de l'ouest, nous sommes en certains lieux en "sur-exploitation" chroniques et permanentes voir parfois délétères de nos terres et les zones vierges de tout passé agricole sont quasi inexistantes... Triste à dire, mais sans mondialisation des échanges efficace, Adieu pour beaucoup d'entre nous aux Modes de vie actuel (y compris les permaculteurs au fond de leur campagne, du fait de leur voiture pour aller sur les marchés des villes un peu éloignées et de l'informatique bon marché(ordi, téléphone, internet, etc...) dont ils disposent/bénéficient aussi, sans parler des services publics pour tous et toutes...).

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