Trudeau relance l'agrandissement d'un oléoduc controversé au Canada

  • AFP
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Le gouvernement de Justin Trudeau a annoncé mardi la relance des travaux d'agrandissement de l'oléoduc Trans Mountain vers la côte Ouest canadienne, une décision saluée par l'industrie pétrolière mais décriée par les écologistes.

A quatre mois des législatives, M. Trudeau a assuré que "chaque dollar généré par ce projet" serait investi "dans la transition écologique du Canada".

"Aujourd'hui, j'annonce que notre gouvernement ira de l'avant avec le projet d'agrandissement de l'oléoduc Trans Mountain", a-t-il dit en ajoutant qu'il avait "aussi entendu les Canadiens qui nous ont dit qu'ils voulaient un avenir plus vert".

Il a précisé que les travaux devraient commencer "cet été". Une fois le projet terminé, Ottawa devrait empocher "environ 500 millions de dollars par année" (334 millions d'euros) en recettes fiscales additionnelles.

"On va investir cet argent ainsi que les profits générés par la vente de l'oléoduc dans des projets d'énergie renouvelable qui vont alimenter nos maisons, nos entreprises, et nos communautés pour des générations à venir", a ajouté M. Trudeau.

Le gouvernement avait nationalisé l'an dernier l'oléoduc au prix de 4,4 milliards de dollars canadiens (3 milliards d'euros).

Le projet vise à tripler la capacité de l'oléoduc Trans Mountain pour écouler 890.000 barils de pétrole par jour sur 1.150 km entre l'Alberta, assise sur la troisième réserve mondiale d'or noir, et la banlieue de Vancouver, avant de l'exporter vers l'Asie.

M. Trudeau a également invoqué le fait que l'exportation d'or noir vers l'Asie permettrait de réduire la dépendance du Canada à l'égard du marché américain et que le transport par oléoduc du pétrole était beaucoup plus sûr que par rail.

Cette décision a déclenché la colère des conservateurs, farouches défenseurs de l'industrie pétrolière, qui y voient une gabegie budgétaire, mais aussi des écologistes, jugeant cette mesure contraire à l'Accord de Paris sur le climat, dont le Canada est signataire.

- "Irresponsable" -

M. Trudeau a reconnu ne pas être en mesure pour l'instant de fournir "un montant exact" pour l'agrandissement du projet, qui avait été estimé à 7,4 milliards de dollars (4,9 milliards d'euros) en 2015.

L'organisation écologiste Environmental Defence a qualifié d'"irresponsable" la décision du gouvernement Trudeau qui, selon elle, va entraîner "une hausse additionnelle de 15 millions de tonnes" des émissions de gaz à effet de serre du Canada.

Hasard du calendrier, l'annonce de mardi est intervenue moins de 24 heures après le vote par la Chambre des communes d'une motion proclamant l'"urgence climatique nationale". Ce vote a eu lieu à l'initiative du gouvernement de M. Trudeau, qui compte ériger la lutte contre les changements climatiques en enjeu majeur des prochaines élections.

Pour le Premier ministre, autoriser l'agrandissement de Trans Mountain va de pair avec la lutte contre le réchauffement de la planète généré par les émissions anthropiques de gaz à effet de serre.

Le gouvernement de Justin Trudeau avait autorisé en 2016 la société américaine Kinder Morgan à agrandir l'oléoduc avant de le nationaliser.

Mais la Colombie-Britannique, d'où ce pétrole devrait être chargé sur des navires, avait porté l'affaire en justice, épaulée par une coalition d'écologistes et de communautés autochtones.

En août dernier, la justice avait donné raison aux opposants, notamment en jugeant que les conséquences environnementales de l'agrandissement n'avaient pas été prises en compte.

Ottawa avait alors demandé au régulateur du secteur, l'Office national de l'énergie (ONE), de tenir de nouvelles consultations auprès des populations affectées, notamment des groupes d'Amérindiens, afin de tenir davantage compte des impacts sur l'environnement.

- Participation des autochtones -

M. Trudeau a précisé que le gouvernement comptait à terme revendre l'oléoduc et s'est dit ouvert à l'éventualité que des autochtones puissent acheter des parts de ce projet à l'avenir.

Dans un nouveau rapport émis en février, l'ONE a reconnu que tripler Trans Mountain risquait "d'entraîner des effets environnementaux négatifs importants" pour une population d'épaulards en péril de la région de Vancouver, et une augmentation des émissions de gaz à effet de serre.

Malgré tout, l'agence fédérale avait recommandé au gouvernement d'aller de l'avant, "vu les avantages considérables du projet et les mesures proposées pour réduire au minimum les incidences".

Avec cet obstacle juridique levé et le nouveau feu vert du gouvernement fédéral, les travaux pourraient donc débuter avant les élections législatives d'octobre pour lesquelles les troupes libérales de M. Trudeau sont au coude à coude avec l'opposition conservatrice dans les derniers sondages.

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