Zimbabwe: les tarifs de l'électricité s'envolent, la crise s'aggrave

  • AFP
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Le Zimbabwe a annoncé mercredi le quadruplement des tarifs de l'électricité dans un pays où les coupures de courant s'éternisent jusqu'à 18 heures par jour, nouvelle illustration de la crise dans laquelle il n'en finit pas de s'enfoncer.

Le prix du kilowatt est passé de 0,38 à 1,62 dollar zimbabwéen (0,11 dollar américain) en raison de "la dépréciation de la monnaie locale face aux devises étrangères", a justifié l'agence de régulation de l'énergie (Zera).

Cette flambée des prix de l'électricité est la deuxième en l'espace de deux mois. En août, ils avaient déjà enregistré une augmentation allant jusqu'à 400%.

Mais malgré cette hausse, la société publique de production et de distribution d'électricité (ZETDC) n'avait "pas été en mesure de fournir suffisamment d'électricité, conduisant à de longues heures de coupures", a expliqué Zera.

Les coupures peuvent durer jusqu'à dix-huit heures par jour, bouleversant la vie des entreprises et des particuliers.

Des sociétés sont contraintes de fonctionner la nuit, le seul moment où l'électricité est de nouveau disponible, et des habitants de se lever en pleine nuit pour faire tourner leurs machines à laver ou arroser leur potager.

Avec le nouveau quadruplement des tarifs, "les autorités s'attendent à une amélioration de l'approvisionnement" car la ZETDC "va pouvoir importer de l'électricité", a assuré Zera.

Mais, pour les Zimbabwéens étranglés par la crise, cette flambée des tarifs est avant tout synonyme de galère supplémentaire.

"On dirait que le seul programme de ces gens au gouvernement est de nous rendre la vie difficile, à nous les pauvres", a réagi Reason Magashu, vendeur de fruits et légumes à Harare. "Comment peuvent-ils quadrupler (les tarifs) alors qu'on galère après l'augmentation de 400%" en août ?

Depuis plusieurs mois, le pays a renoué avec l'hyperinflation qui l'avait une première fois lessivé il y a dix ans.

En août, l'inflation s'est envolée à près de 300% sur un an, selon le Fonds monétaire international (FMI). Mais des économistes estiment qu'elle est au moins deux fois plus élevée.

- Retour des pénuries -

Rien que la semaine dernière, le prix d'un billet de bus a doublé et ceux des carburants ont encore augmenté de 25% après plusieurs hausses ces derniers mois.

En janvier, le quasi-triplement des prix avait provoqué des manifestations réprimées dans le sang. Au moins 17 personnes avaient été tuées par les forces de l'ordre.

Le Zimbabwe est embourbé depuis deux décennies dans une profonde crise économique.

Le président Emmerson Mnangagwa, qui a succédé fin 2017 à Robert Mugabe après près de quatre décennies au pouvoir, a promis de relancer l'économie et de faciliter les investissements, mais jusqu'à présent sans succès.

La situation a même empiré depuis un an. Les pénuries - d'argent liquide, d'électricité, de carburants, d'eau, de médicaments... - ont refait leur apparition et beaucoup de familles survivent avec un seul repas par jour.

Compte tenu de la crise, la banque britannique Standard Chartered Bank a annoncé mercredi la fermeture de six de ses neuf succursales dans le pays.

Le quadruplement des tarifs de l'électricité "va avoir un impact considérable sur l'économie", a réagi un économiste, Prosper Chitambara, interrogé par l'AFP. "Cela va encore accroître l'inflation et on va voir des employés demander des augmentations de salaires".

Les médecins sont déjà en grève depuis début septembre. Ils se disent "dans l'incapacité" de se rendre au travail, compte tenu du prix des transports et de l'essence.

Avec la dégringolade de la monnaie locale, ils ne gagnent plus que l'équivalent de 115 euros par mois.

Le gouvernement leur a proposé ce week-end une augmentation de 60% de leurs salaires, aussitôt jugée ridicule par les grévistes qui ont décidé de poursuivre leur mouvement malgré les menaces de révocation.

Comme si la crise économique ne suffisait pas, le Zimbabwe est aussi confronté à une très forte sécheresse, qui menace de famine sa population. D'ici janvier, près de la moitié de ses habitants, soit 7,7 millions de personnes, se retrouveront en situation d'insécurité alimentaire, selon l'ONU.

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