Approvisionnement en électricité : le scénario central de RTE « crédibilisé » pour cet automne/hiver

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Barrage hydroélectrique de Roselend et sa retenue d'eau

Barrage hydroélectrique de Roselend et sa retenue d'eau. (©EDF-Dominique Guillaudin)

RTE avait publié mi-septembre ses perspectives pour le système électrique français durant l’automne et l’hiver 2022-2023. Dans le contexte actuel de fortes incertitudes, cette analyse a « vocation à être réactualisée tous les mois jusqu’à la fin de l’hiver » et le gestionnaire de réseau a ainsi présenté ce 18 octobre une première réactualisation(1). Que faut-il en retenir ?

Une tendance baissière de la consommation d'électricité

En septembre 2022, la consommation d’électricité dite « structurelle » (c'est-à-dire corrigée des aléas météorologiques) a chuté « de l'ordre de 5% par rapport au niveau d'avant-crise » selon RTE(2).

Cette chute de la consommation est particulièrement marquée dans le secteur de l'industrie (8 à 9% de baisse pour les grands sites industriels raccordés au réseau public de transport), dans un contexte de ralentissement économique « en lien avec les prix élevés de l'électricité ».

Le plan de sobriété énergétique annoncé le 6 octobre par le gouvernement(3) est également « de nature à conduire une réduction de la consommation d’électricité en particulier sur les secteurs résidentiel et tertiaire ». RTE souligne que la tendance baissière de la demande - qui réduit les risques pesant sur l'équilibre du réseau électrique dont il est en charge - devra être confirmée « d'ici début novembre ».

Puissance électrique appelée en moyenne sur le réseau électrique de RTE

Quid de la disponibilité du parc nucléaire ?

Côté offre, RTE souligne que « la disponibilité du parc nucléaire est exactement conforme » à ses prévisions présentées début septembre (vision bien plus prudente que celle d'EDF(4)). Selon le gestionnaire de réseau, le « bon avancement des travaux » lié aux problèmes de corrosion sous contrainte (CSC) de certains réacteurs « crédibilise la perspective d’atteindre une disponibilité de 45 GW au cœur de l’hiver » (sachant que la puissance cumulée du parc nucléaire français dépasse légèrement 61 GW).

Toutefois, RTE note que les mouvements sociaux sur le parc nucléaire ont déjà « conduit à des prolongations d’arrêt généralement de deux à trois semaines sur les réacteurs dont la remise en service était imminente ou proche » et que la possible prolongation de ces mouvements « aurait des conséquences importantes sur le cœur de l’hiver ».

La situation concernant l'énergie hydraulique, autre grande filière bas carbone du mix électrique français (12% de la production en France métropolitaine en 2021), s'est par ailleurs améliorée : « malgré des stocks hydrauliques historiquement bas au cours de l’été du fait d’une sècheresse historique, la gestion prudente des exploitants » a permis de ramener les stocks hydrauliques à mi-octobre 2022 dans « la partie basse de l’enveloppe des niveaux observés à la même période au cours des dernières années ».

Évolution du stock hydraulique français selon RTE

« Malgré le niveau toujours bas des stocks, la plupart des barrages français devraient globalement être en mesure de produire cet hiver lors des pointes de consommation (mais moins en dehors) comme prévu dans l’analyse de mi-septembre », selon RTE. (©Connaissance des Énergies, d'après RTE).

Des stockages de gaz, quelles autres incertitudes ?

« La campagne de remplissage des stockages pour l'hiver 2022/2023 se termine avec des stockages remplis à plus de 99% », avait indiqué la Commission de régulation de l'énergie (CRE) le 5 octobre dernier(5) (au niveau européen, le niveau de remplissage des stocks atteint 92% au 14 octobre selon RTE).  « À court terme, les centrales à gaz ne courent pas de risque d’être empêchées de fonctionner », conclut ainsi RTE.

D'autres grands facteurs susceptibles d'affecter l'équilibre du réseau électrique français « évoluent conformément à la vision centrale de RTE », comme le niveau des effacements de consommation retenus par appel d'offres pour 2023 (2,7 GW, soit une hausse de 36% par rapport à l'appel d'offres pour 2022(6)), l'état des interconnexions ou les décisions des pays voisins (comme le maintien en activité de 3 réacteurs nucléaires au 1er trimestre 2023 par l'Allemagne).

Les prévisions météorologiques rendent « peu probable » une vague froid à court terme mais ces prévisions sont « surtout fiables à des échéances d'une à deux semaines », concède RTE. En définitive, le dernier mois « crédibilise le scénario central » présenté mi-septembre par le gestionnaire de réseau : les risques pesant sur le réseau électrique français sont jugés « très faibles » jusqu'à fin octobre, puis « en augmentation », avec toujours de nombreuses incertitudes (dont l'issue des mouvements sociaux en cours et la disponibilité des capacités nucléaires).

Le gestionnaire de réseau signale enfin à nouveau son incompréhension face aux prix de l'électricité sur les marchés à terme : l'anticipation des marchés reste « largement supérieure à celle de RTE, même dans le cas d'aléas particulièrement défavorables et de moins en moins probables ».

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