Leasing social : « un levier pérenne pour aider les ménages les plus modestes ? »

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Modèle Peugeot du leasing social

La Peugeot E-208 fait partie des modèles éligibles au dispositif du leasing social. (©Stellantis)

 

Le gouvernement a lancé le 30 septembre dernier une seconde campagne de son dispositif de leasing social : « une offre de location longue durée de voitures électriques à moins de 200 euros par mois pour permettre aux ménages les plus modestes de passer à l’électrique »(1).

Nous avons interrogé Auguste Simonin, consultant Énergie chez Wavestone, sur le renouvellement de ce dispositif et sur son efficacité.

Quels enseignements peut-on tirer de la première campagne du leasing social en 2024 ?

Ce dispositif a été mis en place pour démocratiser la mobilité électrique auprès des foyers les plus modestes, qui en seraient exclus autrement. La mise en place d'un loyer « LDD » (location longue durée) ou « LOA » (location avec option d'achat) permet ainsi d'accélérer le développement d'une mobilité propre, avec une problématique de justice sociale en intégrant ce public.

Le leasing social est assez ambitieux et a connu un succès immédiat : en 2024, 47 000 ménages ont été accompagnés par le dispositif sur les près de 90 000 dossiers déposés(2). Ce sont les concessionnaires qui envoient les demandes à l'ASP (Agence de services et de paiement) pour validation et ceux-ci poussent à déposer des dossiers.

Beaucoup de personnes jeunes ont profité du dispositif l'an dernier : les bénéficiaires en 2024 avaient en moyenne 40 ans(3), soit 9 ans de moins que la moyenne des acquéreurs de voitures particulières neuves électriques en 2023 et 14 ans de moins que la moyenne des acquéreurs de voitures particulières neuves dans leur ensemble.

Par ailleurs, la marque Stellantis avait fourni à elle seule 70% des véhicules des particuliers choisis dans le cadre du leasing social en 2024(4).

Quelles sont les nouveautés de cette édition 2025 ?

Le dispositif est mieux structuré : il est désormais financé par le dispositif des CEE (certificats d'économies d'énergie), qui couvre jusqu'à 27% du coût TTC d'acquisition du véhicule, avec un montant global par voiture plafonné à 7 000 € TTC. L'enveloppe du dispositif est de 370 millions d'euros pour près de 50 000 dossiers retenus (ndlr : c'est le montant minimum annoncé par le Gouvernement). Le bénéficiaire paie pour sa part un loyer de moins de 200 € par mois, hors entretien, accessoires ou assurance.

Le cahier des charges et le ciblage sont plus explicites. Un modèle de voiture loué dans le cadre du leasing social doit atteindre un score environnemental minimum défini par l'Ademe(5), ce qui exclut de fait les véhicules produits hors d'Europe.

Le véhicule doit être neuf et destiné à un usage professionnel, avec une distance minimale de 15 km entre le domicile et le lieu de travail à justifier : l'employeur - ou le bénéficiaire s'il n'est pas salarié - doit signer une attestation « gros rouleur ». La distance peut être vérifiée par Géoportail en sélectionnant le trajet le plus court. 

Le dispositif vise aussi à mieux cibler les usages, en incluant les contraintes géographiques comme les ZFE : la suppression de ces zones -même s'il reste encore un passage en commission mixte paritaire avec le Sénat pour la confirmer - n'a pas modifié l'ambition initiale d'un ciblage local du dispositif, avec « au moins 5 000 voitures pour les personnes dont le domicile ou le lieu de travail est situé dans une commune où la qualité de l'air doit être particulièrement améliorée »(6).

L'ASP s'est enfin mieux préparée à cette édition, avec des webinaires et des FAQ pour les concessionnaires, offrant ainsi plus de clarté pour les opérateurs, avec des locations standardisées. 

Où en est-on actuellement ?

C'est aujourd'hui un modèle de financement attractif avec une véritable demande. La campagne a débuté le 30 septembre et le nombre de dossiers maximal devrait déjà avoir été atteint.

Les concessionnaires proposent tout de même de continuer à postuler au cas où des dossiers transmis ne seraient pas valides. Nous avons dépassé le nombre de dossiers pouvant être validés mais il n'y a en soit pas de plafond pour le nombre de dossiers pouvant être reçus.

Que change le financement via les CEE ? Peut-il avoir une incidence sur les prix de l'électricité ?

Le dispositif des CEE, qui existe depuis longtemps, permet d'orienter l'argent des « obligés » via des fiches ou des programmes comme celui du leasing social. L'Ademe et l'ASP font le lien avec ce dispositif qui va ainsi profiter dans ce cas aux ménages les plus modestes.

Ce dispositif peut bien sûr avoir un impact sur le prix de l'électricité, comme l'a indiqué la Cour des Comptes dans un rapport de septembre 2024(7).

Le leasing social vous semble-t-il un outil efficace pour décarboner la mobilité ?

Une question se pose aujourd'hui : s'agit-il d'un petit coup de pouce temporaire ou d'un levier pérenne pour aider les ménages les plus modestes ? Si c'est le cas, il faut encore renforcer la fluidité du mécanisme, ne pas créer de frustration, mieux cibler les usages...

Malgré les progrès de cette nouvelle édition, le dispositif reste globalement encore trop flou pour les ménages. Il est loin d'être aussi simple qu'un abonnement internet ou l'achat d'un véhicule thermique.

Certains éléments ne sont par ailleurs pas pris en charge, notamment le coût de l'assurance obligatoire qui est estimé entre 30 € et 100 € par mois, ce qui représente un montant conséquent par rapport au contrat mensuel du leasing. Il pourrait être utile de diversifier les leviers en intégrant par ailleurs au dispositif l'aide à la recharge à domicile et d'inclure les véhicules d'occasion dans le dispositif.