Nucléaire : la CRE publie ses évaluations, pas de VNU en perspective en 2026

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La Commission de régulation de l'énergie (CRE) a présenté ce 30 septembre son évaluation des coûts complets du nucléaire et une estimation des revenus nucléaires d'EDF pour 2026. Deux chiffrages indispensables dans le cadre du mécanisme succédant à l'ARENH : le « VNU » (versement nucléaire universel).

Rappels sur le mécanisme post-Arenh

L'architecture du mécanisme succédant à l'ARENH « n'est pas totalement intuitive », reconnaît la président de la CRE, Emmanuelle Wargon. Et toutes ses modalités ne sont de surcroît pas encore connues, le décret sur le VNU étant toujours « en cours de rédaction ».

Ce VNU repose sur 2 outils prévus par l’article 17 de la loi de finances pour 2025 : une taxe sur l'utilisation du combustible nucléaire pour la production d'électricité (sous certaines conditions) et une redistribution intégrale des montants (éventuels) issus de cette taxe aux consommateurs d'électricité.

La taxe se déclenche suivant deux seuils :

  • lorsque les revenus d'EDF générés par son parc nucléaire sont au moins supérieurs de 5 à 25 €/MWh (la valeur au sein de cette fourchette fait partie des points restant à trancher par le gouvernement) aux coûts complets de production du nucléaire (tarif de taxation), l'écart fait l'objet d'une taxation de 50% ;
  • lorsque les revenus d'EDF générés par son parc nucléaire sont au moins supérieurs de 35 à 55 €/MWh aux coûts complets de production du nucléaire (tarif d'écrêtement), la tranche supérieure fait l'objet d'une taxation de 90%.

Par conséquent, les revenus d'EDF liés à sa production nucléaire ne sont taxés que s'ils sont supérieurs au niveau du premier seuil (tarif de taxation).

Les coûts complets du nucléaire : 60,3 €/MWh sur 2026/2028

La CRE est en charge de calculer les coûts complets du nucléaire existant (57 réacteurs actuels dont l'EPR de Flamanville 3) pour les périodes 2026-2028 et 2029-2031. Pour ce faire, elle a retenu les hypothèses de production nucléaire suivantes :

  • 362 TWh par an pour la période 2026-2028 ;
  • 358,4 TWh par an pour la période 2029-2031. La CRE rappelle à ce sujet que les 400 TWh de production annuelle envisagés par EDF à l'horizon 2030 est un « objectif managérial ».

Sur cette base, la Commission envisage les coûts complets de production suivants :

  • 60,3 €2026/MWh (ou 61,5 €courants/MWh) sur la période 2026-2028 ;
  • 63,4 €2026/MWh  (ou 68,4 €courants/MWh) pour la période 2029-2031.

La dernière évaluation de la CRE, qui date de 2023, avait retenu un montant assez proche de 60,7 €2022/MWh. Cette relative stabilité dans l'appréciation des coûts du nucléaire s'explique par plusieurs effets se compensant : certains ont un impact baissier (changement de méthodologie avec le retrait de trois briques extra-comptables dans le calcul des coûts, période de 3 ans prise en considération contre 5 ans auparavant, hypothèses d'allongement de l'exploitation du parc) d'autres un impact haussier (coût du capital plus élevé et inflation).

Coûts complets du nucléaire selon la CRE

L'évaluation de la CRE est inférieure de près de 6% à celle d'EDF (64,4 €2026/MWh), qui juge que le coût du capital pris en compte dans le calcul devrait être plus élevé. La prochaine estimation de ces coûts complets du nucléaire est prévue dans 3 ans.

Quels revenus pour EDF ?

EDF a déjà vendu « une partie significative » de son productible nucléaire pour 2026, même si la CRE ne communique pas sur ce niveau. La Commission évalue à ce jour les revenus nucléaires d'EDF pour 2026 à 23,7 milliards d'euros (pour une production de 360 TWh)(1), ce qui revient à un montant de 65,86 €/MWh. Autrement dit, près de 5,4 €/MWh de plus que les coûts complets du nucléaire estimés. 

Sachant que la taxe du mécanisme post-Arenh pourrait se déclencher au plus bas lorsque ce montant est de 5 €/MWh, il est très peu probable qu'un VNU soit appliqué en 2026, constate la CRE.

La CRE doit encore actualiser sa prévision du montant des revenus nucléaires d'EDF au 1er novembre, puis au 1er décembre 2025. Le montant définitif de ces revenus ne sera naturellement connu qu'en fin d'année prochaine, lorsque les derniers mégawattheures auront été vendus sur le marché spot, mais il ne devrait pas connaître de grosses variations par rapport aux estimations actuelles (compte venu des ventes déjà réalisées), « sauf catastrophe sur les marchés », note Emmanuelle Wargon.

Consulter le rapport de la CRE « Évaluation des coûts complets de production de l’électricité au moyen des centrales électronucléaires historiques pour la période 2026-2028 » (septembre 2025).

Sources / Notes

  1. Dans le détail, la CRE précise que l’estimation des revenus annuels de l’exploitation des centrales électronucléaires historiques est « la somme de quatre composantes : les revenus sécurisés issus des transactions constatées dans la comptabilité appropriée à la date du calcul ; les revenus relatifs aux contrats de long terme en vigueur à la date du calcul, estimés de manière prévisionnelle par EDF ; les revenus prévisionnels restant à valoriser pour la part de la production non couverte à la date du calcul ; il s’agit ici à la fois d’estimer le volume de production n’ayant pas encore fait l’objet d’une transaction et le prix à laquelle cette production restante pourrait être valorisée ; la valeur de la forme captée par le parc nucléaire du fait de sa modulation en temps réel ».

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