Les cadres de l'État s'attaquent à un« Everest » : diviser par cinq l'empreinte carbone des Français...

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Un "Everest" à gravir d'ici à 2050 : une centaine de hauts fonctionnaires réunis mardi à Paris ont testé différents leviers pour diviser par cinq l'empreinte carbone des Français, une tâche à l'ampleur "un peu démesurée", selon nombre de participants. 

Spécialiste du développement durable, cadre du numérique, pilier du ministère de l'Agriculture... dans une petite salle de formation de l'Institut national du service public (INSP, ex-ENA), treize cadres de divers ministères prennent connaissance de leur mission de la matinée. D'ici à 2050, pour arrêter d'émettre davantage de gaz à effet de serre que la Terre ne peut en absorber, "chacun doit réduire son empreinte carbone annuelle à deux tonnes d'équivalent CO2", dit Olivier Pons Y Moll au groupe numéro 1.

Or "ces dernières années", un Français a émis en moyenne "9,5 à 10 tonnes" d'équivalent CO2 chaque année, ajoute le formateur chargé d'animer un des huit "Ateliers 2 tonnes" proposés mardi aux hauts fonctionnaires. L'affirmation fait réagir un participant. "On arrive aujourd'hui à avoir une baisse de l'empreinte (carbone moyenne) sur les cinq à dix dernières années", insiste ce cadre du ministère de la Transition écologique. "En 2021, on était à neuf tonnes. C'est encore trop mais c'est quand même 10% de moins" que 10 tonnes, ajoute-t-il.

Reste néanmoins à tracer un chemin vers l'objectif de deux tonnes.

Journée sans viande rouge, rénovation des logements, développement des transports en commun et du télétravail : tout au long des huit étapes de l'atelier, les participants doivent choisir les politiques publiques et les gestes individuels à mettre en œuvre pour diminuer l'empreinte carbone des Français, et en écarter d'autres.

Au fur et à mesure de la matinée, le groupe découvre l'impact en tonnes de carbone de chacun de ses choix. Commencé dans la bonne humeur, l'atelier se termine par un soupir collectif : avec les politiques publiques et les gestes retenus par le groupe, l'empreinte carbone moyenne des Français ne baisserait qu'à environ six tonnes d'équivalent CO2 par an.

"On est encore loin des deux tonnes", souffle une des trois femmes du groupe à la fin de la matinée. "Il ne faut pas être bisounours, ça va quand même être dur, la transition écologique...", avance cette haute fonctionnaire du ministère de l'Économie. Un constat confirmé par les résultats des sept autres groupes : aucun n'est parvenu à abaisser l'empreinte carbone en dessous de 3,17 tonnes d'équivalent CO2.

Embarquer les Français

"On avait vraiment l'impression d'avoir fait beaucoup d'efforts et on n'y est toujours pas arrivés", se désespère une membre du groupe numéro 3, qui a abouti à une empreinte carbone de 4,71 tonnes d'équivalent CO2 en 2050.

"On est face à un Everest", confirme Pierre-Alix Lloret, coconcepteur de l'Atelier 2 tonnes. Mais "il y a plusieurs itinéraires pour arriver au sommet de cet Everest : certains vont dire il faut interdire, d'autres il faut accompagner, subventionner... c'est à nous de le choisir", poursuit-il.

Un appel à l'action et à l'optimisme déjà formulé dans la matinée par le ministre de la Transformation publique Stanislas Guerini, qui invitait la centaine de cadres présents à "sortir de cet atelier avec l'envie de faire". "On a besoin de messages positifs, ça entraîne davantage encore le changement", a-t-il encore assuré.

À la fin des ateliers, la nécessité "d'embarquer" un maximum de Français dans le mouvement de réduction des émissions fait d'ailleurs consensus. "On n'attaque pas un bilan carbone sans avoir sensibilisé ses équipes, sinon on ne l'emmène pas", assène Olivier Pons Y Moll à son groupe, qui n'est parvenu à "embarquer" que 16% des Français avec ses choix de politiques publiques.

Avant d'impliquer l'ensemble de la société, les cadres de l'État sont d'abord appelés à diffuser les connaissances acquises mardi au sein de leur ministère.

D'ici à la fin du quinquennat en 2027, l'objectif du gouvernement est de former les 5,7 millions d'agents publics à la transition écologique. "On a une fenêtre d'opportunité, mais si on tergiverse, on va être contraints par les conséquences d'un climat qui se réchauffe", avertit la climatologue Valérie Masson-Delmotte, venue conclure les échanges.

Commentaires

Red1
C'est très simple à imaginer en première approche, car diviser son bilan carbone par 5 c'est à peu près diviser tout par 5 (bien sûr je simplifie): la taille de son logement, le poids de sa voiture, la nourriture consommée, les vêtements achetés , les trajets mécanisés, les jours de vacances au ski en Thaïlande et ailleurs, la consommation de médicaments, d'appareils électroménagers, la taille des hôpitaux, des écoles, des facs, en gros, tout ce que l'on fait au quotidien doit être divisé par 5 y compris le salaire, car au final l'impact carbone n'est rien d'autre que la conséquence de toutes nos consommations, donc il faut prendre le pays qui a un PIB/habitant 5 fois inférieur au nôtre et tracer une trajectoire pour ressembler à ce pays. En gros il faut viser le PIB/habitant du Maroc ou du Guatemala (données de 2017). Cependant si on veut garder notre niveau de vie et notre confort, eh bien c'est pas la peine de faire des tables rondes pour essayer de trouver une solution, sauf à faire de l'idéologie et de prendre vos désirs pour la réalité. Alors de grâce arrêtez de vouloir sauver la planète vous qui ne pouvez même pas sauver le pouvoir d'achat ou faire baisser le chômage.
Guillaume
Je pense que ce sera bien plus efficace si ça vient de la base. Cela fait des années que des associations ont donné le mode d'emploi, certes pas simple, car il faut modérer très profondément notre consommation tout en créant des puits de carbone. Je suis très étonné ici qu'on soit dans une approche descendante de la part de gens (les hauts-fonctionnaires) qui commencent à peine à être formés ? Certes, rien ne sera possible sans une prise de conscience de l'appareil politico-administratif.
APO
@Guillaume, D'accord avec vous entre 1/3 et 1/2. Les Actions des individus et/ou groupes d'individus sont très pertinentes et l'état n'y peut rien (exemple : création d'une AMAP pour consommer un peu plus local et aider des jeunes maraichers à s'installer avec des prix garantis, dans le groupe, certains passeront/passeraient des recettes sur des légumes non conventionnelles mais de saison et/ou pour aider à leur transformation : du chou-rouge en lactofermentation c'est super bon (Avis perso) et ça se conserve longtemps sans énergie consommée !!! ). L'autre 1/4 ou 1/3, c'est le secteur des entreprises ou cela commence à bouger mais trop doucement (et trop de greenwashing dans certaines - Hélas !). Si une entreprise ne peut offrir d'abris à vélos pour ses employés, cela peut devenir rédhibitoire pour ceux qui auraient envie de le faire... Et enfin l'état (avec plusieurs niveaux) qui a 1/3 des actions totales à prendre mais surtout des orientations pour légiférer/structurer et faire accélérer le tout... Et l'état ce sont en permanence des arbitrages avec l'opinion publique donc "Les Individus" !!! Joli Triptyque à développer rapidement !!!
Arhur
Qu'on arrête d'em.....er les Français avec ces chiffrages de baisse d'émissions de CO2, qui n'auront aucun effet face à celle, croissantes, des géants émergents (Inde, Asie, Afrique) et encore moins face à celles de la Chine et des us. L'ouvrage de Christian Gerondeau, "La religion écologiste", est éclairant à ce sujet.

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