Rénovation énergétique : refaire l'isolation ou acheter une pompe à chaleur ?

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Isoler les murs ou changer la chaudière ? Pour beaucoup dans la construction, une rénovation efficace commence par le calfeutrage des murs et du toit avant d'investir dans de coûteux équipements électriques destinés à réduire la facture énergétique. Derrière ces choix se joue une bataille industrielle feutrée.

Réduire les coûts liés à la consommation d'énergie

L'annonce surprise de la suspension des dépôts de nouvelles demandes de subventions MaPrimeRénov' pendant l'été a déclenché la colère des artisans du bâtiment, et relancé de vifs débats sur le maintien des aides aux "gestes isolés" (achat de chaudière, remplacement de fenêtres) face aux rénovations dites globales.

En lançant MaPrimeRénov' en 2020, le gouvernement comptait faire d'une pierre deux coups : accélérer la décarbonation des 36 millions de logements en France (20 millions de maisons individuelles et 16 millions de logements collectifs), c'est-à-dire réduire les émissions de CO2 liées à l'usage des bâtiments, et adapter le bâti face aux extrêmes climatiques, canicules, inondations.

Mais, depuis 2022, la crise énergétique déclenchée par l'invasion de l'Ukraine a rebattu les cartes. Désormais, la principale motivation des rénovations est de réduire les coûts liés à la consommation d'énergie, selon l'Observatoire de la construction durable publié en 2024 par le géant des matériaux Saint-Gobain avec l'institut CSA.

« L'isolation d'abord »

Pour faire baisser la facture d'énergie des habitations, "la première chose à subventionner, c'est l'isolation de la maison, les menuiseries, les murs, la toiture, c'est primordial", estime Jeremy Ifrah qui dirige une entreprise de bâtiment à Bagnolet (Seine-Saint-Denis).

"Ceux qui veulent d'abord s'équiper de pompe à chaleur, je préfère ne pas m'en occuper". Leur facture de chauffage ne va pas forcément diminuer si leur logement est mal isolé. "Je vois tous les jours des gens qui comptent les centimes pour remplir le frigo. Comment voulez-vous qu'ils s'en sortent quand il leur faut payer 400 euros de gaz par mois ?" dit-il.

Derrière ce constat de terrain, les fabricants de matériaux s'opposent à ceux qui produisent des pompes à chaleur ou systèmes de régulation électronique destinés à rendre les bâtiments "intelligents".

Le message de "l'isolation d'abord" est porté par Benoit Bazin, PDG du géant des matériaux Saint-Gobain, qui investit énormément dans la recherche pour décarboner la fabrication des plaques de plâtre, vitres ou laine de verre. En matière d'isolants, "il y a un déficit de fabrication française", fait valoir Rafael Rodriguez, qui dirige la filiale française du fabricant danois de laine de roche Rockwool : la France importe "150 à 200 000 tonnes" de laine minérale par an.

"Il faut faire plus de rénovations globales", plaide-t-il. Et si les rénovations monogestes, soutenues par les artisans du bâtiment, "doivent être conservées", elles doivent "être inclues dans un parcours planifié", ajoute le responsable. Selon lui, l'isolation c'est "la base de la pyramide de l'efficacité énergétique".

« 150 ans pour rénover le parc existant »

Pas d'accord, répond Jean-Pascal Tricoire, président du conseil d'administration de Schneider Electric, géant des équipements électriques. D'ici à 2050, "on a 25 ans pour achever la décarbonation des bâtiments en France, mais si on continue à ne faire appel qu'aux procédés du passé, on a zéro chance d'y arriver, ce sera trop lent", déclare le dirigeant à l'AFP.

Selon ses calculs, "on en a pour 150 ans pour rénover le parc existant au rythme actuel". "Pour pouvoir transitionner les usages, il faut beaucoup plus d'efficacité énergétique, or il n'y a que 10% des bâtiments (en France) qui sont digitalisés par exemple" souligne-t-il, en envisageant que les maisons deviennent "productrices d'électricité, intelligentes et largement autonomes".

"Refaire un toit, des fenêtres, ça coûte cher, c'est long et la main d'œuvre n'est pas forcément disponible, alors que déployer une solution digitale pour contrôler les consommations d'un logement ça prend deux jours maximum" et c'est rentable très vite, affirme-t-il.

"Ce qui compte, c'est que chaque projet de rénovation soit discuté avec un professionnel", tempère le PDG du fabricant français de chaudières Atlantic (Thermor, Sauter...), Damien Carroz. Il faut "avancer vite" sur le plan industriel, plaide-t-il : Emmanuel Macron "a promis qu'un million de pompes à chaleur seraient produites en France en 2027, or fin 2025, on ne sera qu'à 100 000 grand maximum".

Commentaires

Gui
Digitaliser la maison plutôt qu'isoler, ça va faire gagner 10% maxi qui vont vite être mangés par la hausse du prix de l'énergie.
Serge Rochain
Il faut simplement ....LES DEUX !
Silicate
On ne peut jamais faire les deux, sauf les très riches Seule l'isolation apporte 25 à30% de gains en gardant le même chauffage ! Amortissement en 5 ans et une fois amorti, on regarde le chauffage Tandis que changer le chauffage sans isoler gagne presque rien : 3 à 5% (amortissement sur 30 ans au mieux) quand au numérique : régler son chauffage tout le monde sait déjà le faire et il uy a déjà des thermostats partout; Les gains supplémentaires sont très faibles .
Bernard
RÉNOVATION des PASSOIRES ÉNERGÉTIQUES PROPOSITION d'un SCÉNARIO RÉALISTE et …CONTRAIGNANT Le gouvernement a choisi de mettre en œuvre une politique particulièrement rigide envers les habitats classés en G, F puis vers les autres niveaux au cours des années à venir. La première conséquence est d'interdire la location de ces logements sauf à réaliser d'importants (le plus souvent) travaux obérant les rendements locatifs. Nombre de propriétaires ne loueront plus leurs biens, privant ainsi la société (et nation) de logements alors que la demande va croissant (familles mono parentales, démographie naturelle, etc.) En France métropolitaine, pour être qualifié de "décent", un logement doit : • à partir du 1er janvier 2023, avoir une consommation d'énergie (chauffage, éclairage, eau chaude, ventilation, refroidissement, etc.), exprimée en énergie finale, inférieure à 450 kWhEF/m²/an. Cette consommation est estimée dans le DPE (attention, il s’agit de la consommation d’énergie finale et non d’énergie primaire) ; • à partir du 1er janvier 2025, avoir au moins la classe F du DPE ; • à partir du 1er janvier 2028, avoir au moins la classe E du DPE ; • à partir du 1er janvier 2034, avoir au moins la classe D du DPE. Cette politique est "suicidaire", impossible à mettre en œuvre sans créer des tensions sociales insupportables…Voici ma suggestion de démarche à mettre en œuvre : Progressivement, dans un délai de quelques années, par exemple 10 -12 ans, imposer à tous les logements (loués ou non) de disposer d'un DPE complet comprenant les éléments actuels MAIS AUSSI de l'étude thermique du logement (nécessité de former des techniciens à cette mission à l'aide de l'un des dizaines de logiciels qui existent déjà sur le marché). C'est le seul moyen d'apprécier la réalité de la situation et de permettre la concrétisation adaptée et efficace d'économies d'énergie. Ces éléments seront pris en compte par le cadastre. Nous disposerons ainsi de "la CARTE d'IDENTITÉ" de tous les logis… Permettant in fine le management des taxes foncières Dans le même temps et progressivement, chaque fois (dès 2024…) qu'un nouveau bail sera généré, l'étude thermique sera réalisée avec le DPE associé (ce dernier pouvant alors être revisité compte tenu des approximations de la démarche actuelle, très critiquables…). Pour des niveaux de déperditions donnés, il ne sera pas interdit de louer, mais on mettra en place trois bornes : 1 – Une borne locative : Un montant des loyers au m² loué sera "attaché à différents niveaux de DÉPERDITIONS 2 – Une borne fiscale : Pour ce même loyer, un taux TDPE de prélèvement "DÉPERDITIONS" sera appliqué 3 – Une borne "prêt pour travaux" : Un prêt PTRE de X€ par m² avec un Taux à Y%, Y pouvant être négatif Un Exemple d'école : Logement classé G (au sens actuel, sera revu avec le bilan thermique) de 80m² : Loyer au m² X€ à 5€, taux imposition TDPE de 50% (et prélèvements sociaux de 17.2%), prêt PTRE X€ de 200€/m² de 16000€ à Y% -2% sur 5ans. Le "fond" de ce "scénario d'apparence livresque", tout en amortissant les coûts énergétiques supportés par les locataires, permettrait de rassurer les propriétaires et bailleurs, de ne pas grever les fonds de l'ETAT, et de lisser l'espace-temps de la formation et disponibilité de tous les métiers concernés par la "RÉVOLUTION" qu'est la TRANSITION ÉNERGÉTIQUE…
ThB
Je pense qu'interdire aux propriétaires de louer les appartements classés F et G est une bonne mesure. Elle pousse les propriétaires à améliorer la performance énergétique de leurs biens. Pour ceux qui n'ont pas mes moyens de faire les travaux ou ceux qui ne veulent pas se créer de nouveaux soucis, il y a de grandes chances qu'ils ne louent plus. Il est probable qu'ils vendront à très courts termes pour ne pas payer les taxes qui elles, continueront à devoir être payées. Ces ventes trouveront preneurs seulement si les prix affichés tiennent compte des travaux d'isolation nécessaires, elles donneront des opportunités aux jeunes primo-accédants qui ne peuvent plus acheter depuis quelques années. Cette mesure peut avoir des effets vertueux sur la rénovation énergétique et dynamiser une partie du marché immobilier, mais elle doit être accompagnée d’aides financières ou d’accompagnement technique pour éviter que les propriétaires ne restent simplement dans l’inaction ou que les logements se dégradent et aligner Airbnb et les locations saisonnières aux mêmes contraintes.
Bernard REYNIER
Bonjour Il me semble que vous n'avez pas compris mon propos et la dynamique que je suggère dont la finalité est bien de rendre tous les bâtis conformes... 4Mais en évitant le blocage instantané des locations. 5Relisez mon papier avec ouverture. 6Cordialement
ThB
Malheureusement c'est la rigidité de la règle qui va permettre de faire bouger les choses. Les propriétaires qui ont l'habitude que le législateur change la loi à chaque contestation (par quelques rentiers minoritaires qui font plus de bruit que les autres) ne feront aucune modification, car tout pourra recommencer comme avant.
Jacques
La suppression de l'autorisation de louer a entraîné une baisse de l'offre locative et effectivement des loueurs ont jeté l'éponge et mettent en vente. L'augmentation de la sévérité des normes de construction neuve associée à l'augmentation des taux d'intérêt a entraîné en baisse des acquisitions du neuf et donc des éventuels candidats à l'accession à la propriété restent en location. Le système s'est en partie bloqué. Essayez de vendre un bien qui est une passoire thermique. Vous verrez que beaucoup de primo accédants y renoncent. Ils sont souvent en activité et ne sont pas toujous bricoleurs. Ils doivent faire appel à des entreprises pour faire le travail et les coûts et les délais explosent et encore quand ils trouvent des entreprises pour faire le travail. Généralement les passoires thermiques ont aussi une électricité et une plomberie à revoir. Cela coûte très cher en rénovation. Il ne faut pas s'attendre à des miracles dans la rénovation d'anciens logements. Votre serviteur a une certaine expérience dans le domaine en se réservant l'essentiel des travaux. On n'y passe un temps certain et chaque jour réserve son lot de contrariétés.
Bernard REYNIER
Je crois moi aussi connaître le sujet... Pour autant vous ne prenez pas en compte l'idée firce que je développe : "LA CARTE D'IDENTITÉ DES LOGEMENTS" Seul moyen de pilitet l'ensemble du domaine y compris et notamment les milliards de subventions inutilement attribuées. Fin de mes messages
Jacques
Tout à fait. Dans vos propositions, vous avez raison de vouloir donner du temps au temps, de partir sur du bilan de la situation, de l'information et d'éventuels moyens de compensation au lieu de légiférer de manière rigide comme cela a été fait. Je me souviens de chiffres qui ont souvent été évoqués sur les plateau télé: environ 5 millions de logements à traiter. Devis selon le type de logement de 25000 € pour de petits appartements à plus de 50000 voire bien plus pour des maisons. Si l'on prend 40000 € cela donne 200 milliards à trouver. Cela ne peut pas se faire rapidement que le financement soit public ou privé.
Goldorak
Je pense que vous etes très optimiste sur les possibilités de l'état pour gérer ce niveau d'information. Je pense qu'associer un DPE fourni lors d'une vente à un logement reste possible mais son actualisation risque d'être une promesse difficile à tenir
Jacques
Tout à fait. Le DPE est obligatoire lors d'une vente mais j'ai connu des cas de DPE pour le moins sujets à commentaires et d'ailleurs ce point est actuellement un problème. D'ailleurs, dans certains cas, il y a une difficulté pour faire un DPE sérieux. Pour que l'état gère une base de données sur le sujet, cela risque effectivement d'être compliqué.
ThB
Ce que vous décrivez est parfaitement exact, j'ai constaté aussi cet état de fait avec des délais d'interventions bien longs et des entreprises pas toujours à la hauteur. J'ai aussi constaté que les prix de vente des biens en défaut d'isolation ne sont pas en corrélation avec l'ampleur des travaux. Ces propriétaires qui ne souhaitent pas devant le montant et l'importance des travaux les faire ne les mettent jamais en vente en soustrayant au prix de vente le montant assez élevé que sont les travaux d'isolation et de rénovation. Vendre un bien presque au même prix qu'un bien conforme et assez bien isolé est une utopie que ces derniers (plutôt mercantiles) ont du mal à accepter. Aussi ils préfèrent dépenser beaucoup d'énergie pour que les règles qui les favorisent au détriment des jeunes souvent et des moins riches ne changent pas ou soient retardées.
monmejean
sur le sujet on dit tout et son contraire ! Et tout le monde oublie le debut de l´histoire , à l´epoque ou les equipemtiers des energies fossiles faisaient alliance avec les farbricants d´isolants pour interdire le chauffage electrique afin de freiner le developpement nucleaire ! Mieux vaut du CO2 que du nucleaire pouvait on entendre chez les ecologistes de pure souche ! Les temps changent mais qu´importe , il faut continuer a vendre de l'isolation et pour ca il faut des programmes ambitieux de renovation !tout azimuts ! Meme si la France n´en a pas les moyens . En oubliant de dire que pour un meme besoin la Pac consommera trois fois moins qu'une chaudiere ! oui le kWh elec est plus cher mais pas trois fois plus que celui du gaz! Encore faudrait il reviser les taxes , et mettre sur la table la taxe carbone ! Polueurs payeurs dit on !
M
Avec ce type de questions binaires stériles, le grand public trouve une bonne excuse pour ne rien faire en s'abritant derrière le flou des réponses... Il faut bien sûr encourager toutes les options, afin que chacun puisse avancer au mieux en fonction de sa situation spécifique.
Juanito du deux six
On ne le répètera jamais assez, une PAC dans un logement mal isolé a un mauvais COP (=surconsommation d'électricité) voire ne peut chauffer correctement le logement : https://www.negawatt.org/IMG/pdf/2211_pac_strategie_renovation.pdf

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