- Connaissance des Énergies avec AFP
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Les paramilitaires en guerre contre l'armée au Soudan ont pris lundi le contrôle du plus grand champ pétrolifère du pays dans la région stratégique du Kordofan, selon des sources paramilitaires, militaires et industrielles jointes par l'AFP.
Les Forces de soutien rapide (FSR) "ont pu prendre le contrôle de la zone stratégique de Heglig (...) après la fuite de l'armée", selon un communiqué publié sur leur chaîne Telegram.
Les troupes de l'armée se sont retirées de la zone "pour protéger les installations pétrolières et éviter des dommages", a confirmé à l'AFP une source militaire sous couvert d'anonymat.
Heglig est situé à l'extrême sud de la région du Kordofan, devenue l'épicentre des combats après la prise de contrôle par les paramilitaires, en octobre, de la totalité de la région du Darfour, dans l'ouest du pays.
Depuis avril 2023, la guerre entre l'armée et les paramilitaires a tué des dizaines de milliers de personnes et provoqué le déplacement de 12 millions d'habitants, mais aussi dévasté les infrastructures de ce pays d'Afrique de l'Est.
- "Désastre" -
La récente offensive des FSR au Kordofan vise, selon les analystes, à briser les dernières lignes de l'armée autour du centre du Soudan pour pouvoir reprendre la capitale Khartoum et d'autres villes clefs.
Les communications défaillantes et les annonces contradictoires des belligérants compliquent les vérifications indépendantes dans cette zone difficile d'accès.
Mais les responsables locaux, des humanitaires et les Nations Unies signalent une intensification des frappes de drones, des bombardements, des déplacements de population et des risques d'exactions sur les civils.
L'armée a accusé à plusieurs reprises les FSR de lancer des frappes de drones sur Heglig, ce qui, en août, avait conduit à la suspension de l'activité du site.
Selon un ingénieur évacué du site contacté par l'AFP, les équipes techniques ont "arrêté la production et les ouvriers ont été évacués vers le Soudan du Sud" après cette nouvelle action militaire des FSR.
Ce site constitue une importante source de revenus pour le Soudan dont l'économie s'est effondrée pendant la guerre.
L'ancien ministre du Pétrole, Gadein Ali Obeid, a qualifié lundi la situation de "désastre". Le pays a maintenant "perdu ses deux principales régions productrices de pétrole, Heglig et Bloc 6", a-t-il dit à l'AFP, faisant référence au site exploité par la Chine depuis 1995 mais qui n'était plus opérationnel depuis le début de la guerre.
- "Frappes insensées" -
La prise de Heglig est aussi un coup dur pour le Soudan du Sud alors que le site abrite la principale installation de traitement pour le pétrole exporté par ce pays et transporté par oléoduc vers la mer Rouge.
Lorsque Juba a fait sécession en 2011, le pays a emporté avec lui presque tous les gisements du Soudan.
Selon les analystes, la guerre que se livrent l'armée et les paramilitaires depuis plus de 20 mois risque à terme de provoquer une nouvelle partition du pays: l'armée contrôle le nord, l'est et le centre, les FSR contrôlant l'ouest et, avec l'aide de leurs alliés, de vastes zones du sud.
Lundi, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a par ailleurs publié un nouveau bilan des frappes de drone du 4 décembre attribuées aux FSR sur une école maternelle et un hôpital de Kalogi, dans la même région du Kordofan, faisant état de 114 morts dont 63 enfants.
Son directeur général, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a condamné sur X des bombardements "insensés".
Il a cité une estimation du système de l'OMS de surveillance des attaques contre les soins de santé, après de premiers bilans qui faisaient état de dizaines de morts.
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