Gaz naturel: après Nord Stream 2, Berlin fait un pas vers le GNL américain

  • AFP
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Critiquée par Washington et en Europe pour son projet de gazoduc Nord Stream 2 depuis la Russie, l'Allemagne devrait opérer mardi un rapprochement avec les États-Unis sur la question de l'importation de gaz naturel liquéfié (GNL) américain.

Le ministre allemand de l'Économie, Peter Altmaier, qui reçoit le secrétaire-adjoint américain à l'Énergie Dan Brouillette, doit ainsi annoncer des mesures pour faciliter la construction d'éventuels terminaux méthaniers destinés au GNL.

Angela Merkel avait levé en partie le voile vendredi: "À l'avenir, on veut avoir du gaz liquéfié, des terminaux méthaniers pourraient être construits en Allemagne". Berlin "veut avoir une diversité dans son approvisionnement énergétique, le gaz russe en fait partie, mais pas exclusivement", a expliqué la chancelière allemande lors d'une conférence de presse. Le GNL nous permettra de nous "approvisionner en gaz auprès d'encore plus de fournisseurs et d'accroître ainsi notre sécurité" énergétique, a renchéri M. Altmaier lundi. Mais il rappelle aussi l'écueil principal du gaz américain : son coût. "Cela doit se faire à des prix compétitifs", a-t-il dit.

Les futurs terminaux, qui se situeraient dans le nord du pays, sont des infrastructures essentielles à l'importation du GNL. Pour les Américains, mettre le pied dans le marché gazier européen constitue une riposte à l'influence énergétique russe, appelée à grandir en Europe avec la mise en service, en 2020, de Nord Stream 2. Ce projet doit permettre de doubler les capacités du premier Nord Stream, qui transporte du gaz de la côte Baltique de la Russie jusqu'à l'Allemagne. Cette route sous-marine directe entre le fournisseur et l'un de ses principaux clients permet aussi de contourner l'Ukraine, alliée aux Occidentaux et en conflit avec la Russie.

Les détracteurs de Nord Stream 2 considèrent donc que ce gazoduc affaiblit l'Europe face à Moscou et trahit les Ukrainiens, même si Mme Merkel a promis de défendre les intérêts de Kiev. Malgré les divisions, les 28 pays membres de l'UE sont parvenus le 8 février à se mettre d'accord pour mieux contrôler le marché du gaz, des changements qui devraient compliquer le fonctionnement de Nord Stream 2.

Dépendance russe, pressions américaine

L'administration américaine avait au préalable menacé de sanctions le projet de gazoduc sous-marin, alors que Berlin est déjà une cible favorite du président américain Donald Trump, qui reproche pêle-mêle aux Allemands leurs excédents commerciaux ou encore des dépenses militaires trop réduites. Pour un diplomate européen, "Washington a mis une énorme pression sur les capitales européennes ces derniers jours pour empêcher Nord Stream 2".

"Nous ne sommes pas fondamentalement contre le gaz russe en Europe, mais nous sommes contre trop de gaz russe qui rend nos partenaires dépendants ", a souligné l'ambassadeur américain en Allemagne, Richard Grenell, dans l'hebdomadaire Welt am Sonntag. Et selon lui, 16 des 28 pays membres de l'UE partagent les craintes de Washington. Le porte-parole de Mme Merkel, Steffen Seibert, avait assuré en octobre que la décision de construire un terminal pour le GNL serait prise indépendamment de ce type de pressions.

"De (telles décisions) se font en fonction de l'intérêt qu'ont l'Allemagne et l'Europe à avoir une infrastructure pour les importations énergétiques qui soient diversifiées, sûres, compétitives et abordables", avait-il déclaré. D'ailleurs, même si l'Allemagne fait un pas vers Washington, le GNL américain restera à moyen-terme bien trop cher pour pouvoir concurrencer en Europe le gaz russe et constituer une alternative crédible.

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