- Connaissance des Énergies avec AFP
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Les autorités turques ont déplacé vendredi lors d'une opération spectaculaire dans le sud-est du pays un tombeau du 15e siècle pour éviter qu'il soit englouti par les eaux dans le cadre d'un projet de barrage controversé.
Le tombeau de Zeynel Bey a été construit en hommage à l'une des figures de la tribu Ak Koyunlu qui contrôlait alors une large partie de l'Anatolie orientale et une partie du Caucase, rivalisant avec les Ottomans. Le monument, connu pour son dôme et ses superbes mosaïques turquoises, est situé à Hasankeyf, dans la province de Batman (sud-est).
Une grande partie du village va se retrouver sous les eaux ou subir des dégâts du fait du projet de barrage d'Ilisu qui vise à améliorer l'approvisionnement en énergie de la région à majorité kurde.
A l'aube, le tombeau, qui pèse 1 100 tonnes, a été chargé sur une plateforme géante équipée de roues et pris la route vers un parc archéologique situé deux kilomètres plus loin. Le trajet a duré environ cinq heures, mais le chef de l'agence turque des eaux, Murat Acu, a déclaré que l'installation complète du tombeau dans son nouvel emplacement prendrait trois jours.
Des dizaines de badauds ont assisté au déplacement du monument, paré d'un drapeau turc, a constaté un photographe de l'AFP. Zeynel Bey, fils du fondateur de la dynastie Ak Koyunlu, est décédé en 1473 dans une bataille contre les Ottomans.
Situé sur les rives du Tigre, Hasankeyf abrite de nombreux vestiges des époques romaine, byzantine, pré-ottomane et ottomane. Les autorités turques assurent qu'elles feront tout leur possible pour préserver le patrimoine qui pourrait être menacé par le projet de barrage. "Nous avons mené des excavations archéologiques dans la région du barrage, identifié les sites historiques et mis en place des projets pour les protéger", a ainsi assuré le ministre des Eaux et Forêts, Veysel Eroglu.
Mais des militants locaux craignent que le caractère unique du lieu ne soit estompé. "Le déplacement du tombeau de Zeynel Bey serait un acte impardonnable de destruction du patrimoine culturel et une violation des droits humains de la population locale", ont affirmé dans une lettre ouverte publiée en ligne début mai différents groupes militants, dont l'Initiative pour maintenir en vie Hasankeyf.
Un journaliste français indépendant, Mathias Depardon a été arrêté lundi à Hasankeyf alors qu'il y effectuait un reportage pour National Geographic. Selon les autorités, il a été arrêté pour "propagande terroriste" en faveur des séparatistes kurdes. Il attendait vendredi d'être expulsé vers la France.
