La filière nucléaire revoit à nouveau à la hausse ses prévisions de développement, la Chine en chef de file

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Vue de la centrale nucléaire de Trillo en Espagne

Vue de la centrale nucléaire de Trillo en Espagne. (©Endesa)

La World Nuclear Association (WNA), qui fait la promotion de l'industrie nucléaire, a publié le 7 septembre dernier son Nuclear Fuel Report 2023. Elle y révise sans surprise à la hausse ses perspectives de développement pour la filière.

Prolongation des durées d'exploitation et développement des SMR

Le parc nucléaire mondial compte 437 réacteurs en service d'une puissance cumulée de 391 GW, selon les dernières données de la WNA arrêtées à fin juin 2023 (dont 93 aux États-Unis, 56 en France et 55 en Chine(1)). S'y ajoutent 63 tranches en construction d'une puissance cumulée de 64 GW.

La filière a compté pour 9,2% de la production mondiale d'électricité en 2022, mais surtout pour « environ un quart de la production mondiale d'électricité bas carbone », souligne le rapport. Un atout fort souligné par la filière dans le contexte de la transition énergétique qui passe par une électrification « bas carbone ».

Parmi les facteurs favorables à l'essor du parc nucléaire mondial, l'association salue les autorisations de pays disposant de grands parcs nucléaires à poursuivre l'exploitation de réacteurs jusqu'à 60 ans d'activité (Canada, France, Japon, Russie, Ukraine), voire jusqu'à 80 ans dans le cas des États-Unis. La WNA souligne par ailleurs « un fort intérêt pour les SMR (petits réacteurs modulaires) et microréacteurs dont la construction et le financement est simplifiés » en comparaison avec les grands réacteurs de l'ordre du gigawatt de puissance.

La Chine au cœur du développement du parc nucléaire d'ici à 2040

La WNA présente ses prévisions de développement du parc nucléaire mondial à travers 3 scénarios : l'un dit de « référence » est basé sur les annonces et objectifs officiels des gouvernements et compagnies, un scénario « bas » suppose des retards dans la mise en œuvre de ces plans tandis qu'un scénario « haut » esquisse le « potentiel » de développement de la filière « dans des conditions plus favorables ».

Selon le scénario de référence de la WNA, le parc nucléaire mondial pourrait compter 474 réacteurs en 2030, soit 60 tranches de plus qu'à l'heure actuelle (dont 41 réacteurs supplémentaires en Chine). À l'horizon 2040, ce parc pourrait compter 656 réacteurs, dont... 188 en Chine. Dans le scénario « haut », le monde compterait 519 réacteurs nucléaires en 2030 et 841 réacteurs en 2040 (dont 270 tranches en Chine à cet horizon). Le scénario « bas » envisage un parc limité à 433 réacteurs nucléaires en 2030 (soit légèrement moins qu'à l'heure actuelle) et 493 en 2040 (dont 147 en Chine). 

Au total, la capacité cumulée du parc nucléaire mondial pourrait s'élever entre 486,3 GW et 931,3 GW en 2040 selon les scénarios de la WNA (685,8 GW dans le scénario de référence), contre 366,3 GW à fin 2022. La Chine est appelée à compter pour presque un tiers de ces capacités à l'horizon 2040, quel que soit le scénario retenu, contre 14% à l'heure actuelle.

Précisons que les SMR pourraient compter « jusqu’à 10% des capacités totales installées dans le scénario haut en 2040, mais pour seulement 0,4% dans le scénario bas », selon la WNA.

Implications pour les besoins d'uranium

Les besoins d'uranium du parc nucléaire mondial en 2023 sont estimés à 65 650 tonnes par la WNA. Dans son scénario de référence, l'association estime que ces besoins vont augmenter à 83 840 t en 2030 et presque 130 000 t en 2040.

Elle rappelle que les activités d'exploration d'uranium ont connu une forte chute ces dernières années (- 88% entre 2014 et 2020), avant de croître à nouveau dans le contexte de regain pour l'énergie nucléaire (ces investissements se sont élevés à 277 millions de dollars en 2021 selon la WNA).

La World Nuclear Association souligne qu'il faut « 8 à 15 ans pour atteindre la production » après la découverte de nouvelles ressources et qu'un « développement intense de nouveaux projets sera nécessaire dans la décennie à venir pour éviter de potentiels perturbations d'approvisionnement »(2).

Sources / Notes

  1. Sans compter 2 réacteurs nucléaires implantés à Taïwan.
  2. La World Nuclear Association rappelle que la production d'uranium provenant des mines et des usines d'enrichissement (production dite « primaire ») continue de satisfaire la majorité des besoins de combustible nucléaire. « À court terme, les fournitures secondaires d'uranium vont continuer à jouer un rôle pour combler l'écart entre approvisionnement et demande » mais cette production secondaire est amenée à voir son rôle baisser entre 4% et 11% à l'horizon 2040 (selon le scénario retenu) contre 11 à 14% à l'heure actuelle.

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