Émissions mondiales de CO2 : état des lieux

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Emissions de gaz à effet de serre

L'Allemagne, dont l'impact environnemental des centrales à charbon est pointée du doigt, a compté pour 2,2% des émissions mondiales de CO2 en 2014. (©photo)

En 2014, les émissions mondiales de CO2 liées à la combustion d’énergie et aux procédés industriels(1) ont augmenté de 0,5% par rapport à l’année précédente, selon les dernières données que vient de publier dans une note le ministère français en charge de l’énergie. Quels en sont les principaux enseignements ?

La lourde contribution du charbon et du pétrole

Les émissions mondiales de CO2 liées à la combustion d’énergie et aux procédés industriels se sont élevées à 35,7 milliards de tonnes (Gt) en 2014. Elles correspondent à 85% des émissions totales de CO2 dans le monde (qui incluent aussi l'« utilisation des terres, leurs changements et la forêt »(2) qui ne sont pas comptabilisées ici). Le ministère français en charge de l’énergie évoque une « quasi-stabilisation » de ces émissions par rapport à 2013 (+0,5%) en rappelant que leur croissance moyenne atteignait 2,5% sur la période 2000-2013. Précisons que ces émissions constituent approximativement 65% de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre (qui incluent également entre autres le méthane et les oxydes d’azote).

Les émissions mondiales de CO2 en 2014

Les émissions mondiales de CO2 en 2014 sont supérieures de 58% à celles de 1990, année de référence du protocole de Kyoto. (©Connaissance des Énergies, d’après ministère en charge de l’énergie)

Dans les pays en voie de développement(3), les émissions mondiales de CO2(4) ont presque triplé depuis 1990, près de 60% de cette hausse étant liée à la progression de la consommation de charbon. En 2014, près de 42% de ces émissions sont au total imputables à la combustion de charbon qui reste la principale source d’électricité dans le monde. Cela explique pourquoi le charbon a fait l’objet de vives critiques lors de la COP21 alors que les technologies de « charbon propre » (par exemple les dispositifs de capture et de stockage du CO2 adossées aux centrales électriques) ne sont pas compétitives à l’heure actuelle.

Signalons par ailleurs que 31% des émissions mondiales de CO2 sont dues à la combustion de pétrole et 18% à celle de gaz naturel qui est de plus en plus privilégié pour accompagner le développement des énergies renouvelables et pallier l’intermittences de certaines d’entre elles (principalement l’éolien et le solaire photovoltaïque). A l’heure actuelle, rappelons que plus de 80% de la consommation d’énergie primaire dans le monde est satisfaite par les énergies fossiles. Hors combustion d’énergie, les émissions restantes communiquées(4) par le ministère en charge de l’énergie proviennent de procédés industriels : fabrication de ciment, opérations de « torchage », incinération de déchets sans récupération d’énergie, etc.

Plus de la moitié des émissions imputables à 3 pays

Près de 29,6% des émissions mondiales de CO2 ici comptabilisées proviennent de la Chine. Le 2e émetteur mondial, à savoir les États-Unis, contribue approximativement moitié moins à ces émissions (15% du total mondial). Les conclusions sont toutefois inversées lorsque l’on rapporte ces émissions à la population : un Américain émet approximativement 16,5 tonnes de CO2 en 2014, soit plus de 2 fois plus qu’un Chinois (7,6 tonnes de CO2/habitant).

La Chine a d’autre part fortement ralenti la croissance de ses émissions en 2014 (+0,9%), en partie en raison d’un ralentissement économique mais aussi de changements dans la structure d’activités du pays (hausse de la part des services) et de ses politiques visant à réduire l’utilisation inefficace de charbon.

C’est l’Inde, dont la consommation de charbon a fortement augmenté, qui a le plus contribué à la croissance des émissions mondiales en 2014 (avec une hausse de ses émissions de 7,8% par rapport à 2013). Ce pays compte désormais pour 6,6% des émissions mondiales mais ses émissions par habitant restent très limitées (1,8 tonne de CO2/habitant).

Dans l’Union européenne, les émissions de CO2 ont été réduites de 5,4% en 2014. Cette baisse a été plus marquée encore en France (-8,3%) et au Royaume-Uni (-8,9%). Elle est en partie imputable à l’hiver moins rigoureux cette année-là par rapport à 2013 mais aussi à la faible croissance économique et au renforcement des politiques environnementales des États membres. Les émissions de CO2 par habitant ont atteint 6,7 tonnes en 2014 au niveau européen et seulement 5 tonnes en France, entre autres en raison de la production électrique largement « décarbonée » du pays (elle repose aux trois quarts sur le parc nucléaire).

Notons que l’Afrique (3,3% des émissions mondiales), continent de plus de 1,1 milliard d’habitant, a émis moins de CO2 en 2014 que le Japon dont la population est presque 9 fois plus faible.

Emissions de CO2 par pays

En 2014, la Chine, les États-Unis et l’Inde ont compté pour 51,2% des émissions mondiales de CO2. De fortes disparités existent entre ces pays lorsque leurs émissions sont rapportées à leurs populations : celles d’un Américain sont 9 fois plus élevées que celles d’un Indien. (©Connaissance des Énergies, d’après ministère en charge de l’énergie)

Une baisse continue de l’intensité carbone

L’intensité « carbone » permet de mesurer les émissions de CO2 par unité de produit intérieur brut (PIB). Au niveau mondial, elle a été réduite de 4,4% en 2014 et de 59% entre 1990 et 2014, signe d’un « découplage partiel » entre l’activité économique et ces émissions selon le ministère.

Cette baisse de l’intensité carbone est plus marquée encore dans les pays développés mais ces derniers importent désormais les biens « intensifs en CO2 » qu’ils produisaient dans le passé sur leur territoire. Ainsi dans le cas de la France, l’empreinte carbone liée aux importations est en hausse depuis 1990, précise le ministère.

Pour rappel, il faudrait, selon les travaux du GIEC, que l’ensemble des émissions mondiales de gaz à effet de serre baissent de 40% à 70% d’ici à 2050 par rapport au niveau de 2010 et atteindre une économie quasiment « neutre en carbone » durant la deuxième partie du XXIe siècle pour limiter le réchauffement climatique à une hausse de température de 2°C à l’horizon 2100, objectif plancher fixé lors de la COP21.

Cet objectif semble hors de portée en l’absence d’une évolution majeure des mix énergétiques (que n’entrevoit pas l’AIE à l’heure actuelle) et face aux prévisions de croissance démographique (+ 3,9 milliards d’habitants dans le monde d’ici à 2100 selon le scénario central de l’ONU). Pour rappel, l’accord de la COP21 sera ouvert à la signature à partir du 22 avril.

Sources / Notes

  1. La combustion de biocarburants et de biomasse est considérée comme « neutre » en CO2.
  2. La catégorie dite « utilisation des terres, leurs changements et la forêt » (UTCF) est fréquemment utilisée dans les inventaires d’émissions de gaz à effet de serre. Elle désigne notamment le changement d’affectation des sols et la déforestation. Cette catégorie constitue à la fois un puits et une source d’émission de gaz à effet de serre.
  3. Hors Annexe 1 de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 1992. La Chine fait ici partie des pays « en développement ».
  4. Dans la suite de l'article, les émissions mondiales de CO2 liées à la combustion d’énergie et aux procédés industriels sont qualifiées d' « émissions mondiales de CO2 » par souci de simplification.
  5. Les émissions communiquées par le ministère sont issues d’« Emissions Database for Global Atmospheric Research » (EDGAR), un programme du Joint Research Center de la Commission européenne. 

 

Étude « Quasi-stabilisation des émissions de CO2 dans le monde en 2014 », 31 mars 2016, Ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer 

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