Les réseaux de chaleur « plus vertueux » mais loin des objectifs de développement

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Chaufferie bois de Besançon-Planoise

Chaufferie bois de Besançon-Planoise. (©Engie Solutions)

Le Syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine (SNCU)(1) a publié le 10 décembre son enquête annuelle(2) sur le développement des réseaux de chaleur et de froid en France. État des lieux.

798 réseaux de chaleur « de plus en plus vertueux »

Un réseau de chaleur (ou réseau de chauffage urbain) est un système de distribution de chaleur à partir d’une ou plusieurs unités de production et à destination de plusieurs consommateurs. La chaleur est transportée au sein d’un ensemble de canalisations, généralement à l’échelle d’un quartier (mais potentiellement d’une ville entière ou de plusieurs villes). Le principe de fonctionnement des réseaux de froid est « similaire : des frigories sont transportés au lieu des calories », résume Aurélie Lehericy, présidente du SNCU.

Dans son enquête 2020, le SNCU répertorie 798 réseaux de chaleur en France à fin 2019 (soit 17 de plus qu’à fin 2018), d’une longueur cumulée de 5 964 km. Près de 41 000 bâtiments (principalement résidentiels et tertiaires) - soit « 2,37 millions d’équivalents logements » - sont raccordés à ces réseaux de chaleur qui appartiennent pour la quasi-totalité d’entre eux à des collectivités locales.

Le gaz naturel constitue toujours la première source d’énergie « entrante » de ces réseaux de chaleur (35,2% du bouquet énergétique en 2019, contre 37% en 2018) mais la part des énergies renouvelables et de récupération (EnR&R) continue de progresser : cumulées, ces filières ont compté pour 59,4% du mix des réseaux de chaleur français en 2019 (principalement grâce aux unités de valorisation énergétique de déchets et à la biomasse) et la production de chaleur « verte » a quasiment doublé depuis 2009(3).

Réseaux de chaleur en France
Les énergies renouvelables et de récupération ont compté pour 59,4% de la chaleur livrée par les réseaux de chaleur français en 2019, contre 31% en 2009. (©Connaissance des Énergies, d’après SNCU)

La progression des EnR&R au sein des réseaux de chaleur se ressent dans l'évolution du « contenu moyen de CO2 » de la chaleur livrée par les réseaux de chauffage urbain : 107 g CO2/kWh en 2019, soit 44% de moins qu’en 2009 (190 g CO2/kWh).

Bien que les réseaux de chaleur français soient « de plus en plus vertueux », la production totale de chaleur livrée par ceux-ci a peu augmenté au cours de la dernière décennie : 25,6 TWh en 2019, soit 9,4% de plus qu’en 2009 (23,4 TWh). Cela correspond à seulement près de 3,4% de la consommation totale de chaleur en France (741 TWh en 2019). Le SNCU rappelle que cette consommation de chaleur compte pour environ 40% de la consommation d’énergie finale de la France(4).

Fonds Chaleur et rythme de développement

Le Fonds Chaleur, qui fête ses 10 ans, a accompagné le déploiement de la chaleur « renouvelable » en France. Les aides du dispositif sont à la fois orientées vers les installations de production et vers le transport de la chaleur via les réseaux (pour environ 40%)(5). Et « cette politique publique coûte très peu cher par rapport à d’autres aides » (notamment en faveur de la production électrique d’origine renouvelable), souligne Fabrice Boissier, directeur général délégué de l’Ademe. Ces aides du Fonds Chaleur s'élèvent au total à 350 millions d’euros en 2020.

La France est toutefois loin de ses objectifs en matière de développement de la chaleur « renouvelable » et d’extension des réseaux de chaleur : leur rythme de développement est « deux fois inférieur à celui qui serait nécessaire pour atteindre l’objectif fixé pour 2030, à savoir la multiplication par cinq des quantités de chaleur livrée depuis 2012 », souligne le SNCU.

Malgré leur compétitivité (prix de vente moyen de 74,6 €HT/MWh pour la chaleur distribuée), les réseaux de chaleur souffrent entre autres du « coût historiquement bas des énergies fossiles ». Pour tout comparatif (notamment avec le gaz collectif), Nicolas Garnier, délégué général d’AMORCE, appelle à « ne pas regarder uniquement la facture au compteur » mais à intégrer le coût d’amortissement des équipements (chaudière, pompe à chaleur, etc.).

Le projet de RE 2020 (future réglementation sur la construction de bâtiments neufs) inquiète par ailleurs la filière. Les nouvelles normes, si elles sont confirmées, favoriseront l’électricité : le contenu CO2 retenu pour le chauffage électrique a été divisé par 3 dans la nouvelle réglementation à 79 g CO2/kWh, souligne Nicolas Garnier qui qualifie cette orientation de « hold up carbone »(6).

Précisons que l’enquête du SNCU fait par ailleurs état de 24 réseaux de froid en France, auxquels étaient raccordés 1 339 bâtiments à fin 2019. 

Objectifs de développement des réseaux de chaleur en France
La loi de transition énergétique pour la croissance verte fixe pour objectif que les réseaux livrent 39,5 TWh de chaleur produite à partir d’EnR&R à l’horizon 2030. (©Connaissance des Énergies, d’après SNCU)

Sources / Notes
  1. Enquête réalisée avec le concours de l’association AMORCE, sous la tutelle du Service de la donnée et des études statistiques (SDeS), du ministère de la Transition écologique.
  2. Le SNCU est l’un des 7 syndicats de la FEDENE. Il regroupe la quasi-totalité des acteurs des réseaux de chaleur et froid (90% de l’activité).
  3. Les EnR&R comptaient pour 31% de la chaleur livré par les réseaux en 2009.
  4. 21% de la consommation de chaleur en France est produite grâce à des EnR&R (155 TWh, dont 15 TWh fournis par les réseaux de chaleur).
  5. Plus de 2 800 km de réseaux de chaleur ont fait l’objet d’aides du Fonds Chaleur.
  6. 44% des réseaux chaleurs (représentant 67% des livraisons de chaleur) ne pourront pas raccorder les futurs bâtiments neufs dans ces conditions.

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