Le GNL dans le transport : intérêts et développement de la filière

STX a déjà conçu plusieurs méthaniers alimentés au GNL, pour Engie et Britanny Ferries notamment. (©STX France)

S’il constitue une forme optimisée pour transporter le gaz naturel, le GNL peut également être utilisé comme carburant. Il constitue une alternative aux produits pétroliers consommés par les navires marchands, les véhicules routiers lourds ou encore les locomotives diesel de certains pays. Cedigaz projette un potentiel de demande de 6,2Mt en 2035 au niveau mondial(1).

Une alternative moins polluante

Le gaz naturel sous forme liquide (GNL) suscite aujourd’hui principalement l’attention du secteur maritime, dans le contexte d’un renforcement des normes environnementales depuis le début des années 2000. Rappelons en effet que près de 7,5% des produits pétroliers dans le monde sont consommés par le secteur maritime, ce dernier étant responsable d’une part importante des émissions d’oxydes d’azote (NOx) et d’oxydes de soufre (SOx). Or, la combustion du GNL émet jusqu’à 90% moins de SOx que celle des fiouls de soute « traditionnels » et jusqu'à 25% de CO2 en moins.

Il est à ce titre présenté comme le plus « propre » des carburants fossiles pour la propulsion marine et fluviale (en attendant l’hydrogène et le stockage d’électricité). De plus, les vapeurs de GNL mélangés à l’air ne sont pas explosives en milieu non confiné et la température d’auto-inflammation est très élevée (580°C contre 250°C dans le cas du diesel marin).

A l’heure actuelle, rappelons que la quasi-totalité des carburants utilisés par les navires sont des dérivés du pétrole : les « Heavy Fuel Oil » (HFO) et les « Marine Gas Oil » (MGO).

Essor dans le transport maritime

En 2023, on décomptait 466 navires marchands à propulsion GNL en service, contre 73 en 2015 et 3 en 2005 ; parmi lesquels principalement des ferrys et des navires ravitailleurs en Europe du Nord. S’ajoutent à ces navires les méthaniers qui récupèrent du gaz évaporé dans leurs cuves et l’utilisent comme carburant.

Leur atout environnemental sur les carburants existants constitue un argument privilégié pour les paquebots de croisière et les grands porte-conteneurs, qui plus est dans un contexte de renforcement de la réglementation internationale sur les émissions atmosphériques des navires.

Souvent, des moteurs hybrides permettent d'utiliser du diesel marin (MGO) de retour au port ou en cas d’indisponibilité du GNL.

En France, l’article 52 de la loi de transition d’août 2015 prévoit en effet que l’État favorise « l’installation de systèmes de distribution de gaz naturel liquéfié […] dans les ports pour les navires et les bateaux ». Au niveau européen, la directive 2014/94/EU encourage le déploiement d’infrastructures dédiées aux carburants alternatifs (dont les points de ravitaillement en GNL).

L’essor de cette flotte, dont plus du double est actuellement en construction, est toutefois encore pénalisé par la densité énergétique du GNL plus faible que celle des fiouls de soute, par une manipulation plus complexe et surtout par le manque actuel d’infrastructures dédiées dans les ports (sites de stockage de GNL, stations d’approvisionnement, etc.).

Comment y remédier ?

L’AFG présentait en 2016 les différentes possibilités de développement d’infrastructures de « soutage » (approvisionnement en hydrocarbures des navires pour leur propulsion) en GNL dans les 28 ports actifs en France métropolitaine(2).

La chaîne logistique de distribution de ce carburant débutera nécessairement à partir des 4 terminaux GNL dont dispose la France. Dans les ports, l’AFG envisageait un approvisionnement des navires à l’aide de camions-citernes GNL disposant d’un flexible cryogénique jusqu’à des besoins de soutage de 50 000 tonnes de GNL par an.

Au-delà de ces volumes annuels, le développement de navires de soutage spécifiques et de stations satellites à quai pour stocker le GNL pourrait être nécessaire. Cette deuxième solution implique toutefois des investissements bien plus lourds (un navire de soutage de 15 000 m3 coûterait de l’ordre de 50 à 60 millions d’euros).

Limites pour le transport routier et ferroviaire

Le manque d’infrastructures d’approvisionnement freine également le développement du GNL dans le transport routier (poids lourds et autocars) qui est cantonnée à trois zones : la Chine et, dans une moindre mesure, les États-Unis et l’Union européenne. Pourtant, cette note rappelle que les coûts d’investissement et de maintenance des poids lourds à motorisation GNL, bien que plus élevés que ceux des véhicules à motorisation Diesel, peuvent être amortis en 3 à 5 ans, compte tenu des écarts de prix en faveur du carburant GNL.

L’absence de normes internationales environnementales contraignantes, le niveau d’avancement technologique du traitement des gaz d’échappement des poids lourds à moteur Diesel et l’importance des facteurs locaux (réseau de distribution, fiscalité, etc.) soutiennent l’hypothèse selon laquelle le développement du GNL, comme carburant alternatif au gazole, sera fonction des écarts de prix des carburants et s’effectuera à un rythme différent selon les régions.

Dans le secteur ferroviaire, le potentiel de croissance du GNL apparaît limité, du fait notamment de la taille réduite de ce marché.

Exemples de bateaux fonctionnant au GNL

Pegasis de Britanny Ferries

La compagnie bretonne Britanny Ferries dispose du ferry PEGASIS (Power Efficient GAS Innovative Ship). Le coût de ce navire est évalué à 270 millions d’euros. Il effectuer des traversées entre le Royaume-Uni, l’Irlande, la France et l’Espagne depuis 2017.

En détails, ce géant propulsé au GNL mesure 210 m de long par 32 m de large. Composé de douze ponts, il peut accueillir 2 663 personnes à bord (dont 189 membres d’équipage) ainsi que 800 voitures. Le combustible principal du navire est le GNL mais le navire pourra également fonctionner si besoin au MGO (carburant marin) : le PEGASIS est équipé de 4 moteurs « Diesel dual-fuel » (GNL ou gazole) entraînant chacun un alternateur, pour une puissance totale de près 45 MW.

Le PEGASIS est équipé d’une membrane spécifique permettant de stocker ce GNL à une pression proche de la pression atmosphérique. Conçue par la société française GTT (filiale d'Engie), cette membrane est implantée dans la cuve de stockage au niveau du pont 1 du navire. La capacité totale de stockage de GNL atteint 1 300 m3, un volume suffisant pour assurer chaque trajet sans ravitaillement.

Paquebots de croisière Costa

Costa Croisières dispose de 4 paquebots fonctionnant au GNL. Deux d'entre eux sont les plus grands jamais conçus, avec 2 605 cabines et une capacité de 6 600 passagers par navire. Construits par les chantiers Meyer à Turku en Finlande, ils disposent de moteurs hybrides de moyenne vitesse à quatre temps alimentés avec du GNL, stocké au sein de 3 réservoirs à une pression allant jusqu’à 4 bars et d’un volume cumulée d’environ 3 500 m3.

Les deux autres paquebots au GNL de la filière allemande du groupe Costa, Aida Cruises, ont été construits sur les chantiers navals de Meyer situés à Papenbourg en Allemagne.

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