Emmanuel Macron annonce la relance d'un nouveau programme nucléaire, les détails pour plus tard

  • AFP
  • parue le

Le président Emmanuel Macron a annoncé mardi que la France allait relancer un programme nucléaire et construire de nouveaux réacteurs sur son sol, en reportant toutefois à plus tard les détails sur ces futurs EPR.

"Nous allons, pour la première fois depuis des décennies, relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays et continuer de développer les énergies renouvelables", a-t-il dit dans une allocution télévisée. Il n'a toutefois pas donné plus de précisions à ce stade sur le calendrier ou le lieu des implantations. Si le mot n'a pas été prononcé, ce sont toutefois des EPR qui devraient être construits : "c'est au Président de faire des annonces mais il s'agit du seul modèle opérationnel d'un point de vue industriel", souligne l'entourage de la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili.

Le projet a pour but de "garantir l'indépendance énergétique de la France, pour garantir l'approvisionnement électrique de notre pays et atteindre nos objectifs, en particulier la neutralité carbone en 2050", a fait valoir Emmanuel Macron. La France, qui tire la majorité de son électricité du nucléaire, ne construit actuellement qu'un seul nouveau réacteur nucléaire, l'EPR de Flamanville (Manche), dont le chantier entrepris en 2007 n'est toujours pas achevé après maints retards et surcoûts.

Mais elle envisage de construire six EPR supplémentaires et EDF avait remis au printemps un dossier au gouvernement sur la faisabilité et les conditions d'un tel programme. Le président Macron a aussi annoncé récemment des investissements dans de futurs petits réacteurs (SMR), mais dont l'horizon est plus lointain que celui de l'EPR, dont des exemplaires sont déjà en service en Chine.

Le nucléaire est l'un des thèmes de la pré-campagne présidentielle de 2022, certains candidats en prônant une sortie plus ou moins rapide (écologistes ou insoumis) tandis que d'autres (notamment à droite et à l'extrême droite mais aussi au parti communiste) sont favorables à cette énergie.

"Si nous voulons payer notre énergie à des tarifs raisonnables et ne pas dépendre de l'étranger, il nous faut tout à la fois continuer d'économiser l'énergie et d'investir dans la production d'énergies décarbonées sur notre sol", a déclaré Emmanuel Macron. "Ces investissements nous permettront d'être à la hauteur de nos engagements au moment où nous allons clôturer la COP 26 à Glasgow", a-t-il assuré, après avoir déjà souligné les avantages de l'énergie nucléaire ces derniers mois, notamment du point de vue climatique. Ses propos interviennent également en pleine flambée des prix de l'énergie en Europe.

« Incroyable »

Le gestionnaire du réseau électrique RTE a récemment présenté un rapport très attendu sur le futur électrique de la France, qui soulignait notamment l'avantage économique à construire de nouveaux réacteurs mais aussi la nécessité de prendre des décisions rapides. Cette publication avait incité l'exécutif à accélérer son calendrier, alors que les décisions sur le nucléaire étaient jusqu'alors repoussées après le démarrage de Flamanville - attendu fin 2022, donc lors du prochain quinquennat.

"RTE nous dit qu'il faut agir vite, donc la décision va être prise, et rapidement", avait souligné fin octobre la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, ouvrant la voie à des annonces d'ici la fin de l'année. Elle a insisté mardi soir sur le "triptyque" d'une feuille de route qui repose, outre le nucléaire, sur les économies d'énergie et le "développement massif des renouvelables".

EDF, qui a mis en œuvre un plan d'amélioration après les dérives du chantier de Flamanville, assurait encore lundi que la filière "sera prête" et pourrait livrer de nouveaux EPR dans le respect des coûts et du calendrier. Outre le défi industriel, la Cour des comptes avait souligné l'an dernier l'enjeu financier "majeur" d'un tel programme, chiffrant le coût de construction de six EPR de nouvelle génération (EPR2) à 46 milliards d'euros.

"L'annonce de la relance du nucléaire était certes prévisible, mais elle est incroyable, et presque illégale sur la forme, un débat national étant nécessaire", a critiqué mardi le député écologiste Matthieu Orphelin.

Commentaires

Vlady

Avant de s ' avancer plus loin dans le nucléaire , a-t-on réglé définitivement le problème des déchets et combustibles usés ?

Chlore

Indépendance nationale ? D'où vient l'uranium ?
La neutralité carbone en 2050? RTE a donné 6 scénario pour y arriver dont 3 sans nouvelles constructions. Cette décision n'est ni technique, ni économique, elle n'est que politicienne.

Denis Margot

Historiquement, la notion d’indépendance énergétique est arrivée avec le pétrole. Cette notion prend tout son sens lorsque 100% ou presque de l’énergie est importée et où les quantités sont tellement importantes qu’il n’est pas possible de stocker plus de quelques mois de consommation. À cette dépendance, s’ajoute la facture qui contribue énormément au déficit à cause des sommes en jeu. Ce paradigme n’existe pas avec l’uranium en France. Les stocks représentent en effet entre 3 et 5 années de consommation, ce qui met le pays à l’abri de tout embargo. Quant à la facture nucléaire, à l’inverse du pétrole, les matières premières représentent une faible part de la facture totale (env 5%). Le nucléaire représente donc bien un système où l’indépendance énergétique peut être revendiquée.

chlore

La démonstration est intéressante , mais butte sur deux cailloux , l'un technique, l'autre politique.

Chacun sait que la part de l’électricité dans la consommation d’énergie finale représente actuellement entre 20 et 25% du total (55% en 2050 dans le scenario RTE, mais on est encore en 2021). Parler d’indépendance énergétique me parait au mieux une distorsion de langage, au pire un mensonge, on devrait parler "d’indépendance électrique", d'autant que la part du nucléaire dans la production électrique doit descendre dans les années à venir sous les 50% : première observation.
Deuxième observation, le rapport de RTE a souligné l'importance, quelque soit le scénario envisagé, d'un « développement significatif des énergies renouvelables » et a ajouté que les réseaux devaient être redimensionnés et adaptés à une production désormais moins centralisée. Ce qui veut dire aussi interconnexion avec les autres réseaux européens d'autant plus nécessaire que l'on fait appel à des énergies plus ou moins intermittentes (quand il n'y a pas de vent au Danemark, il y a peut-être du soleil en Espagne ou en Italie). Depuis longtemps, les lignes électriques traversent les frontières ( contrairement aux nuages radioactifs...), nous vendons ou nous achetons de l'électricité à nos voisins européens. Vouloir "en même temps" l’indépendance énergétique (électrique) du pays et la construction européenne me semble quelque peu contradictoire et raisonner "hexagonal" parait un peu dépassé.

Prenons justement un peu de hauteur par rapport à l'hexagone. Qui, en dehors de la Chine et de la Russie, a des projets de centrales nucléaires dans le monde : l'Inde, le Pakistan, la Turquie , l’Arabie saoudite, l'Iran, j'en oublie. Admettons que l'Inde remplace avantageusement le charbon par le nucléaire. Mais pourquoi des pays (à régime plus qu'autoritaire) situés dans des zones "inondées" de soleil se lancent dans ces projets ? Un élément de réponse : sûrement pas pour y instaurer la démocratie (n'oublions pas au passage la dissémination des produits fissiles) . L'une des questions politiques soulevées par le nucléaire, qu'il soit civil ou militaire (qu'on ne me dise pas que cela n'a rien à voir, le conflit latent entre l'AIEA et l'Iran est là pour prouver le contraire) est son association avec la notion de puissance de l’État qui en a la "maitrise". Qui a du nucléaire dans son arrière boutique peut prétendre occuper un siège à la table des discussions internationales.

On est loin de notre campagne électorale pour 2022 et "en même temps" en plein dedans : pourquoi ce choix du pouvoir, si ce n'est pour des raisons électoralistes à court terme et politico-diplomatiques à moyen terme. La soi-disant indépendance énergétique n'est qu'un argument du passé assez pauvre destiné à attirer des voix "nationales". Le rayonnement de la France a-t-il besoin de cette fuite en avant (non nécessaire techniquement, le rapport de RTE le montre) et "en même temps" retour en arrière, j'ai quelques doutes.

L’avenir à long terme dans tout cela ? La question est hors sujet.
.

Goldorak

Attention, là vous prenez l’énergie finale, pas initiale. et celle ci est trop diverses pour en sortir ce genre de conclusion
Si on électrifiait la majorité de ce que l'on consomme, nous n'aurions pas besoin de 4 fois plus d’électricité. (par exemple pour une voiture le rendement des thermique est dans la pratique autour de 15%, pour l’électricité c'est plutôt de l'ordre de 75%).

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