- Connaissance des Énergies avec AFP
- parue le
Un ancien géologue réputé d'Areva (Orano), qui avait découvert en 2005 des indices d'uranium au Canada, était jugé lundi à Paris pour ne pas avoir déclaré un trust néo-zélandais, lors d'une audience avec en toile de fond les pratiques financières du géant français du nucléaire à l'époque.
Agé de 71 ans, ce retraité franco-canadien qui a passé sa vie à rechercher des gisements d'uranium à travers le monde s'est défendu d'avoir voulu frauder le fisc, affirmant ne s'être "jamais enrichi personnellement" et n'avoir "en aucun cas" bénéficié du trust.
En 2005, Claude Caillat avait exploré le nord du Québec avec un autre géologue et ami de longue date, qui possédait 10% des parts de la société Uranor, société canadienne d'exploration détenue à 90% par Areva. Ils y découvrent des "indices" d'uranium en surface, insuffisants néanmoins pour évaluer l'éventuel volume du minerai en profondeur.
Deux ans plus tard, Areva rachète pour 47 millions les 10% de cette société dont la création avait permis de toucher des crédits d'impôts par l'administration fiscale canadienne. "Il n'était pas démontré que le gisement existait. Comment Areva peut dire on est prêt à mettre 47 millions sur la table ?" s'interroge le président de la 32e chambre correctionnelle de Paris. "La stratégie d'Areva c'était de vendre des réacteurs nucléaires. Ce qui était important pour la direction, c'était de faire croire à nos clients qu'on avait des ressources d'uranium", répond M. Caillat.
Immédiatement après le rachat, Stéphane Saint-Onge, un avocat fiscaliste canadien, installé aux Bahamas et à l'origine de la création d'Uranor, crée un trust discrétionnaire, adossé à un compte luxembourgeois, dont le seul bénéficiaire est M. Caillat et sur lequel est versé 17 millions de dollars canadiens. Un montage "très opaque" et "complexe" "peut-être à dessein", pointe le président.
Était-ce une manière pour le géologue canadien de remercier son ami pour leur découverte ? Ou une manière pour lui et l'avocat fiscaliste d'échapper au fisc canadien ? "J'étais totalement étranger à ce monde financier. Je n'ai pas voulu m'opposer, mais je n'ai jamais considéré que c'était mon argent", s'est défendu celui qui se décrit comme "géologue de terrain".
L'enquête pour tenter de retracer les flux financiers depuis et vers ce trust et identifier les bénéficiaires a buté sur l'absence ou le refus de coopération de la part de Hong-Kong, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et de la Suisse. "Les véritables fraudeurs ne seront pas inquiétés. Ils sont à l'étranger", a insisté Me Laurent Le Méhauté, estimant que son client "a été manipulé".
Le parquet national financier a requis un an de prison avec sursis et 200 000 euros d'amende. Pour l'accusation, M. Caillat a eu "en partie la maitrise" sur 2 millions d'euros investis dans une assurance invalidité en Grande-Bretagne et a eu des agissements de "dissimulation". Jugement le 21 mars.