En Hauts-de-France, tension sur l'essence et panique à la pompe

  • AFP
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Son Alfa Romeo est "presque à sec", mais c'est enfin son tour. Après quatre stations à sec et une heure d'attente en plein centre de Lille, touché comme tous les Hauts-de-France par un manque de carburant, Federico Caracciolo souffle : Il va pouvoir faire le plein. "C'est vraiment pénible", peste le trentenaire, qui travaille dans la fibre optique et n'a d'autre objectif, en ce mercredi matin, que de se rendre au travail. Il cherche de l'essence depuis la veille.

Les difficultés d'approvisionnement se font sentir dans toute la France, en particulier dans les stations TotalEnergies, victimes du succès d'une remise à la pompe et d'une grève dans ses raffineries et dépôts. Mais depuis quelques jours, les manques sont particulièrement criants dans le Nord et le Pas-de-Calais, avec certaines villes, comme Arras ou Béthune, très affectées.

Les deux préfets ont interdit mercredi la vente et l'achat de carburant dans des jerricans, appelant la population à "faire preuve de civisme et de solidarité". À Lille, plusieurs stations Total sont fermées. Autour de certaines autres stations, les rues sont bouchées. "Regardez le mec avec son Audi !", peste Philippe Blondel, un retraité furieux contre les resquilleurs, qui attend dans une station Esso du centre. "Rien à foutre: il va bloquer tout le monde pour gagner une heure! C'est inadmissible !"

« On n'en peut plus »

Une riveraine excédée observe les files de voiture qui jouent à touche-touche. "C'était comme ça hier jusqu'à 11h du soir. Les coups de klaxon, on n'en peut plus".

Dans la file, Henri Fontaine pensait lui avoir trouvé la parade, via un groupe Facebook avec ses collègues pour échanger des tuyaux sur les stations opérationnelles. "C'est le gros sujet en ce moment", sourit ce technicien d'une quarantaine d'années. Peine perdue : lui aussi est contraint d'attendre au volant de son utilitaire pour remplir son réservoir. L'appli qu'il a téléchargée sur son téléphone ne permet pas de savoir si les stations sont achalandées, raconte-t-il.

Sur l'A1, à proximité de Bapaume (Pas-de-Calais), la file d'accès à la station-service déborde jusque sur l'autoroute. Même scène sur l'A23, près de Genech (Nord), où certains conducteurs ont quitté leur habitacle pour prendre l'air ou fumer une cigarette. Des panneaux de signalisation, en lettres orange, préviennent les automobiliste si la prochaine station est à sec. A eux de prendre leurs dispositions.

« C'est un peu la guerre »

La situation stupéfie Sofiane Ladjmi, un Tunisien venu en France rendre visite à son frère Aziz, étudiant. Dans le centre de Lille, c'est sa quatrième station : voilà 1h30 qu'il cherche de l'essence pour rallier Paris. "Nous, on a l'habitude d'avoir des pénuries de beurre ou de sucre. Mais l'essence, ça ne manque pas", dit-il. À ses côtés, son frère s'inquiète d'"être en retard pour les cours".

Dans le Nord, un pompiste raconte que les livraisons ont diminué il y a deux semaines et qu'il ne reçoit plus d'essence depuis "déjà une semaine". "Les gens venaient beaucoup plus nombreux que d'habitude, par rapport au prix plus bas, et en une journée on finissait le stock", affirme cet employé de TotalEnergies qui souhaite garder l'anonymat. Dans sa station, un fil de chantier rouge et blanc barre l'entrée des pompes. Et le panneau lumineux affiche 9999 en lieu et place du prix des carburants.

Près d'Arras, François Devillers, un psychomotricien de 35 ans a lui fait une demi-heure de queue. "C'est un peu la guerre", lance-t-il. Faute de gazoil, il a "du décaler certains patients". "Ça fait prendre les chose plus au sérieux sur la nécessité de changer de mode de locomotion, de paradigme", estime Matthieu Delpont, un garçon de café de 44 ans, à la pompe voisine.

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